Les choix
ou … Passages importants
Notre défi, cette semaine, est d’écrire un billet d’humeur sur un sujet qui devient, pour Marie et moi, chaque jour plus présent, au fur et à mesure que notre retraite se pointe au début de juillet prochain.
D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours fait ce que la société attendait de moi. De 0 à 6 ans, j’ai joué, dans la maison et autour de la maison, mais jamais bien loin. À partir de 6 ans, je suis allé à l’école, au collège (école secondaire), au CEGEP puis à l’université, dans l’ordre et dans les temps prévus. Après mon baccalauréat, on m’a offert un emploi dans la fonction publique fédérale à Ottawa, où j’ai déménagé et vécu pendant huit ans. En travaillant, j’y ai aussi fait une maîtrise, ce qui fut un élément considéré pour mon retour à Montréal. Je suis revenu dans cette ville pour continuer dans la fonction publique pendant presque 27 autres années. Dans ce parcours de près de 57 ans maintenant, chaque fin d’étape était la préparation à la suivante. Comme une recette que l’on suit respectueusement la première fois qu’on la fait, j’ai suivi la recette respectueusement.
J’ai fait les choses respectueusement aussi, mais surtout au début ! Le début de ma scolarité primaire et secondaire avant l’âge prescrit a engendré quelques errements et dérives par la suite dans mon parcours scolaire… Pour moi, ces « passages » d’un ordre scolaire à l’autre et d’une étape professionnelle à l’autre ont été moins convenus, ponctués d’hésitations, de périodes d’essais divers et de changements de cap qui, à chaque fois, se voulaient sincères. Au bout du compte, cela a donné des études collégiales interrompues et recommencées quelques fois dans des champs d’intérêts diversifiés, couvrant les sciences de l’éduction, la bibliotechnique, l’aménagement d’intérieur et aboutissant finalement à un DEC en philosophie ! Une fois fixée sur mon choix d’orientation universitaire, soit le bac en éducation préscolaire et enseignement primaire (au moins une chose stable et toujours sue intérieurement) et un début de scolarité universitaire dans les règles, j’ai voulu jumeler études et travail rémunéré, à la fois dans le monde de l’animation et du loisir municipal. Au final, l’obtention du bac m’aura pris huit ans … Ensuite, à l’emploi de la commission scolaire qui m’a engagée, j’ai occupé trois postes : douze ans d’enseignement en école alternative, quatre ans au régulier en quatrième année et treize ans comme conseillère pédagogique de français au primaire. Les constantes : le monde des enfants, l’enseignement et l’apprentissage, toujours l’innovation.
Paradoxe : un grand besoin de sécurité jumelé au besoin de faire les choses autrement… Tout à la fois la peur et le besoin du changement…
Conjointement avec Marie, j’ai décidé que nous mettrions fin à l’étape du travail continu et intensif dans trois mois. Ça s’appelle la « retraite »; je pense davantage à une « réorientation ». Pour la première fois de ma vie consciente (je viens d’éliminer la période de 0 à 6 ans), je commence quelque chose dont je ne connais ni la forme ni le contenu, ni au début ni plus tard. La beauté de ce projet de vie sera de trouver un équilibre entre une implication sociale essentielle et un sage ralentissement d’un rythme qui m’a stimulé longtemps mais qui me convient de moins en moins. Je réalise que jusqu’à présent, mes choix étaient plutôt prévisibles; pour ce qui vient… je ne le sais pas. Depuis plus d’un demi-siècle (soyons un peu solennel), mon travail principal était de prévoir, de me préparer et de contrôler. Je suis maintenant au bout d’un tremplin devant un grand vide. J’ai à la fois le goût de ne pas sauter ET de sauter. C’est un choix pleinement conscient et assumé. Malgré cela, c’est un passage qui entraîne de se définir autrement que par un travail qui a occupé le quotidien (et même plus !) pendant de nombreuses années. Se définir autrement, être soi-même, par soi-même. Redéfinir ce qui fera qu’on se sentira utile et qui nous rendra heureux. Tout à la fois la peur et le besoin du changement…
S.V.P., ne sortez pas les mouchoirs, j’en connais peu autour de moi qui, à la retraite, regrettent le rythme de vie précédent. Pour se sortir de cette langueur, examinons rapidement quelques sources de petits bonheurs à venir: (Désolés pour ceux et celles qui, loin de sortir leurs mouchoirs, ressentent un peu d’envie. Vous pouvez toujours décider d’arrêter de lire ici !)
- Ne plus avoir les blues du dimanche soir, ces moments entre le martini de 17h00 et la vaisselle vers 21h00 où l’on trouve que la fin de semaine est déjà passée et qu’on se met à penser aux tâches qui nous attendent en rentrant lundi matin…
- Lire, écrire, chanter…
- Savourer tous les lundis, qu’ils soient fériés ou pas…et les mardis qui suivront un lundi férié…
- Lire les journaux plus lentement, pas juste en survolant les titres…
- Faire l’épicerie, un jour de semaine, en évitant la cohue des week-ends (par contre, fini le choix de la file la plus longue à la caisse pour pouvoir lire les revues à potins)…
- Aller s’entraîner à ÉPIC en dehors des heures de pointe…
- Partir à vélo sans avoir à se soucier de l’heure du retour…
- Se faire un bol de café au lait, plutôt que la tasse d’espresso bu en vitesse…
- Lire un livre d’une couverture à l’autre en se « nourrissant » de fromage et de vin rouge…
- Avoir des « demains »; pas grave que telle ou telle chose entreprise ne soit pas absolument terminée le jour-même…
- Ne plus se soucier des « retours de vacances » ni du nombre épouvantable de courriels à lire la première journée et des « pseudos » crises importantes et urgentes à régler dans les deux premières heures…
- Faire des choix plus personnels, réduire le nombre de contraintes et les conflits de valeurs…
- En après-midi, aller se faire masser un mardi, voir deux films au cinéma le mercredi ou siroter, un jeudi, une longue bière à une terrasse en s’amusant à regarder les gens pressés passer devant nous.
Ça sera en juillet, quelques jours après le cyclo-défi.
Au début, ça ne sera pas différent des vacances…
Je commence à avoir le goût du mois de septembre…
Yvan et Marie
Je confirme! Cette nouvelle étape de vie est tout simplement savoureuse!!! Un mois déjà et que du bonheur.