Des nouvelles du Pépère à vélo et de sa blonde/maîtresse – 21 juin 2015

Donner un petit coup d’œil dans le rétroviseur

(tout en regardant la route devant soi)

C’était l’anniversaire d’Yvan vendredi. C’est bien, le vendredi! La fin de semaine permet d’étirer l’occasion et les réjouissances. Par ailleurs, certains anniversaires nous rendent plus songeurs que d’autres. Comme si les chiffres prenaient une texture, un poids, un volume  différents…

Je suis né un 19 juin.  Ça explique peut-être pourquoi le chiffre 9 a toujours pris une importance particulière pour moi.  Après le 9, il y a toujours un grand changement. 

D’abord, on passe des chiffres à des nombres à deux chiffres: de 9 à 10. 

Puis, chaque fois qu’il apparaît, ce 9,  il annonce la  transformation du premier chiffre du nombre qui suit.  On passe des dizaines aux vingtaines et ainsi de suite. 

J’ai maintenant 59 ans.  J’ai donc vécu 59 ans et, depuis jeudi à minuit, j’ai entamé ma 60e année.

Ayant étudié en mathématiques, pour moi,  les chiffres  comme les mots, représentent depuis toujours des réalités.  Une sœur, un frère, 6 heures du matin, 8 millions de québécois, 59 ans … et… uuuune souris veerte!  À l’aube de cette prochaine décennie, je ressens un certain vertige.  Si on divise notre vie en quatre saisons de 20 ans,  l’hiver débute pour moi.  Ça tombe quand même bien.  J’aime l’hiver.  J’ai toujours eu du plaisir à soutirer de grands bonheurs de cette saison parfois hostile.  Longues journées de ski de fond dans Charlevoix ou en Gaspésie, nombreuses et malhabiles virevoltes sur le canal Rideau, descentes époustouflantes (pour moi !!!) en ski alpin sur le Mont Ste-Anne, autres descentes en « chambres à air » à St-Jean-de-Matha, le tout suivi d’un repas savoureux, de vins capiteux et d’un feu de foyer rassurant.

Mettre le pied dans le début de l’hiver de ma vie n’est donc pas une perspective triste, au contraire.   Toutefois, j’ai l’impression que j’aurai éventuellement, bientôt, à vivre d’austérité.  J’irai moins vite, moins loin, moins longtemps et mon défi sera d’apprendre à savourer ces nouvelles réalités….

Mais pas tout de suite.  Je sens que je peux encore « tricher » avec le temps…

Pour encore quelque temps.

Tricher? Est-ce qu’on a réellement du pouvoir ou du contrôle là-dessus? On s’entraîne, on fait preuve de curiosité, on fait des pactes avec la coloriste, l’esthéticienne, le médecin et le pharmacien, mais au-delà de ça, il reste les gens qu’on aime, l’attitude et un peu de chance, non?!

Yvan et Marie

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Des nouvelles du Pépère à vélo et de sa blonde/maîtresse – 14 juin 2015

Donner des concerts

Avez-vous déjà eu à donner une performance devant une grande foule, seul(e) ou en groupe, dans un sous-sol d’église, un auditorium d’école ou dans une vraie salle de spectacle?  Vous vous souvenez peut-être de la panique des dernières répétitions, du doute de pouvoir offrir la performance attendue, de la magie des premières minutes et des premiers applaudissements.    Mercredi soir, les  jeunes du Garage à musique, en guise de spectacle de fin d’année, se sont joints aux étudiants musiciens du Collège Durocher Saint-Lambert et à quelques artistes connus (ou non, ça dépend de qui!) pour offrir le premier concert-bénéfice de cette organisation.

Imaginez maintenant que depuis quelques mois ou quelques courtes années, vous appreniez à maîtriser le violon, le trombone, la guitare ou la batterie.  Vous êtes sur la scène du théâtre Denise-Pelletier, lieu culturel majeur d’Hochelaga-Maisonneuve où vous n’êtes peut-être jamais entrés.  Dans la salle, votre père, votre mère, le Dr. Julien et plusieurs centaines de personnes endimanchées occupent tous les fauteuils.  Dans quelques instants, le chef d’orchestre donnera le signal pour lancer la pièce d’ouverture, la musique du film Frozen.  Si tout se passe comme lors de la répétition, Christian Bégin, Le Christian Bégin de la télévision, souhaitera la bienvenue au public (l’utilisation de l’italique correspond au sentiment que vous ressentez d’être DEVANT ce public, sans doute pour la première fois!)Pendant le spectacle, vous serez tout près, vous écouterez ou vous accompagnerez les performances de Catherine Major, Nadja, Marc Hervieux et Michel Rivard, tous des gens si gentils que vous n’aviez vu qu’à la télévision.

Les jeunes du Garage à musique du Dr. Julien en répétition (photo des Nouvelles d'Hochelaga-Maisonneuve)

Les jeunes du Garage à musique du Dr. Julien en répétition (photo des Nouvelles d’Hochelaga-Maisonneuve)

À 19h29, une minute avant que le rideau se lève, le cœur de ces jeunes artistes devait battre aussi vite que le mien, attendant le signal de départ d’un défi-vélo.  Les mains moites, les yeux fixées sur la baguette du chef d’orchestre, le temps s’est arrêté.  À partir du moment où cette baguette descendra, plus de deux heures de moments mémorables se dérouleront pour eux et pour nous, à vitesse grand V.  Je garderai particulièrement l’image de cette toute petite jeune fille avec son tout petit violon.  Bien droite sur sa chaise, ses pieds ne touchent pas le sol.  D’où je suis assis, elle semble suivre avec attention sa partition, elle donne des coups d’archets nombreux et passionnés.  Elle était tout à fait rayonnante.

Ce soir-là, j’accompagne Pierrette, la mère de Marie, invitée à assister à ce spectacle, en guise de remerciement pour avoir réalisé un projet tricot de mitaines, tuques et foulards, avec les membres de l’édifice où elle demeure, pont intéressant entre les générations. C’est avec beaucoup d’émotions que nous avons applaudi plusieurs fois cette performance remarquable.

De retour dans leur petit lit, chacun de ces enfants cherchera longtemps le sommeil.  Ils ne le savent pas mais ils ne sont plus les mêmes.  Ils viennent de réussir quelque chose que bien des personnes n’ont jamais fait.  À cause de ça, peut-être leur prochain devoir de français ou leur prochain problème de mathématiques sera-t-il moins effrayant?

Ce mercredi soir, j’ai vu comment le Dr. Julien et les gens qui travaillent avec lui inoculent aux enfants des doses d’espoir.

Ce mercredi-là, j’étais, avec l’Ensemble vocal Katimavik, en répétition avec orchestre et solistes à la salle E du  troisième sous-sol de la Place des Arts. Troisième répétition avec orchestre au même endroit dans la même semaine d’ailleurs. Au moment où j’écris (samedi 14h30), nous avons eu ce matin notre générale à la salle Claude-Champagne de l’Université de Montréal.  Tous ces lieux culturels majeurs sont prestigieux. J’ai déjà chanté en concert, mais je suis à chaque fois  impressionnée par les endroits conçus pour les musiciens. 

À quelques reprises pendant cette semaine chargée, on m’a dit: « T’es pas tannée? C’est super exigeant comme rythme de répétitions… » Sans doute!

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Répétition générale pour l’Ensemble vocal Katimavik

Mais la magie opère: huit mois de répétitions hebdomadaires et rigoureuses, deux fins de semaines intensives de camps musicaux et quelques dimanches plus tard, nous y sommes presque.  Dans quelques heures, nous chanterons avec tout notre cœur, les nuances et l’émotion dont nous sommes capables les Requiem de Salieri et celui de Mozart, les yeux rivés sur le chef. 

Portés par sa compétence, celle des 50 musiciens d’Apassionata et des quatre solistes, les 90 choristes de l’Ensemble vocal espèrent. 

Cet après-midi, entre la générale et le concert, l’écriture de ce billet contribue à apaiser les papillons qui s’agitent à l’intérieur. 

Dompter ses papillons: une expérience incomparable; un apprentissage que tous les enfants devraient avoir la chance de faire.  Parce que lorsqu’ils s’envolent, les papillons, c’est beau!

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Yvan et Marie

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Des nouvelles du Pépère à vélo et de sa blonde/maîtresse – 7 juin 2015

S’abandonner à la vie…

Il a plu.  On a eu chaud et le souffle court dans plusieurs montées.  On a eu froid et on a plongé à près de 60 km/h dans quelques descentes.  Au dîner, on a greloté en mangeant notre lunch debout pour garder un peu de chaleur.  Et au bout de cette boucle de 91 km, on était radieux et fatigués.

De gauche à droite, Dominique, Yvan, Daniel et deux autres cyclistes participant à ce défi.

On vient d’arriver. De gauche à droite, Dominique, Yvan, Daniel et deux autres cyclistes participant à ce défi.

Dimanche dernier, nous avons participé à la troisième édition du Défi Cyclo-Myélome, une boucle partant du Lac Brome, passant par Knowlton, par Magog et au retour via Eastman.

C’est la sixième année, grâce au soutien financier de plusieurs d’entre vous, que je roule dans des défis cyclistes en soutien à la recherche sur le cancer.  Contrairement au Cyclo-défi Enbridge qui a beaucoup de moyens et qui va chercher la participation de nombreux bénévoles et cyclistes, le Défi Cyclo-Myélome est tout petit, c’est presqu’intime.  En 24 heures, nous avons eu le bonheur et l’émotion de rencontrer des personnes vivant avec cette maladie, des médecins et des infirmières qui s’acharnent à « apaiser » les conséquences de ce mal ainsi que des amis et parents de tous ces gens.  En tout et partout, on parle peut-être d’un total de 100 personnes.  Je vous rappelle que:

Le myélome c’est…

Un cancer mortel méconnu et de cause inconnue.

Il résulte de l’accumulation de cellules anormales dans la moelle osseuse, où est produit notre sang. Lorsque survient une accumulation de cellules cancéreuses du myélome, plusieurs problèmes de santé peuvent apparaître, dont la destruction des os, des reins et des cellules normales de la moelle osseuse. Même si les nouveaux traitements arrivent désormais à prolonger la vie des patients, le myélome multiple demeure une maladie mortelle et incurable. (1)

Le myélome représente 1,3 pour cent de tous les nouveaux cas de cancer au Canada et 1,9 pour cent de tous les décès reliés au cancer. Par conséquent, très peu de recherches ont été effectuées sur l’épidémiologie du myélome au Canada. (2)

Pour moi, cette maladie est maintenant davantage qu’une définition; j’y vois maintenant des visages, des sourires et des noms.

C’est d’abord Benoit, que je vous ai présenté dans une chronique récente Il ne pouvait y être physiquement mais il m’a écrit.  C’est à cause de lui que j’ai participé, avec  quelques membres de l’équipe du Pépère à vélo, à cette randonnée. C’est aussi Maryse et Francine, qui en plus de se débattre contre ce mal, organisent ces défis et, quand elles le peuvent, y participent.  C’est le trio dynamique d’infirmières à notre table au souper, Lina, Louise et Christine. C’est le docteur Richard Leblanc, à la tête de la Chaire Myélome Canada et grand chercheur et c’est encore bien d’autres dont j’oublie les noms.

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De gauche à droite, Maryse Bouchard, le docteur Richard Leblanc et Francine Ducas

Au milieu de la nuit, Marie, qui assistait à un concert samedi soir à Montréal, se glisse dans le lit près de moi à l’Auberge du Lac Brome.  Comme Daniel et Dominique, j’aurai aussi mon « encourageuse personnelle ». Vous aurez compris que je la joue discrète cette fois-ci: j’avais un autre engagement le samedi soir, un concert de l’Harmonie dont fait partie l’amoureuse d’Antoine et j’avais promis d’y amener ma mère.  Je suis donc partie de Montréal vers 23 heures, armée de courage et de mon trajet imprimé et j’ai conduit sous la pluie jusqu’au lac Brome, luttant contre la fatigue et le noir profond sur l’autoroute des Cantons-de-l’Est tout en maudissant le fait de ne pas avoir de GPS…  C’est de l’amour ça!

Petit déjeuner enjoué, malgré une météo médiocre. On regarde le dénivelé que nous aurons à affronter.  On sait qu’on va trimer dur.

Au moment de prendre le départ, la minute de silence avait une envergure familiale.  Il y a de ces silences qui ont tellement de signification.

Françoise, Josée et moi, les trois encourageuses officielles, avons pu, en ce dimanche froid, gris et pluvieux,  vivre le moment du départ, prendre ensuite notre temps pour petit-déjeuner, tenter désespérément mais sans succès de magasiner à Knowlton – qui avait l’air d’un village fantôme  – suivre bien au chaud en voiture nos hommes et leur peloton, grelotter avec eux à la halte du dîner, leur prodiguer des conseils essentiels et  judicieux en passant à côté d’eux (tire-pousse, tire-pousse!!!), trouver le moyen de se perdre et demander notre chemin à un kiosque d’information  et finalement les accueillir chaleureusement à leur retour!                                                                                                                                                                                                                                                                                    Dans ces circonstances, rouler, même dans des conditions difficiles, est une célébration de la vie.  La vie qui se bat, la vie qui gagne et qui perd, la vie qui rit et qui pleure, la vie qu’on veut vivre jusqu’au bout.

Longue vie Benoit, Maryse et Francine!

Yvan et Marie

P.S.: Un titre dans La Voix de l’est du 1er juin:  Franc succès pour le Défi Cyclo-Myélome: plus de 71 000$ pour la recherche.(3)

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  1. http://cyclomyelome.org/accueil.php
  2. http://www.myeloma.ca/fr/incidence_prevalence.htm
  3. http://www.lapresse.ca/la-voix-de-lest/actualites/201505/31/01-4874128-franc-succes-pour-le-defi-cyclo-myelome-plus-de-71-000-pour-la-recherche.php
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Des nouvelles du Pépère à vélo et de sa blonde/maîtresse – 31 mai 2015

Donner des mots aux images

Depuis que nous nous connaissons, Marie et moi, nous inventons des histoires à propos des gens qui nous entourent. Souvent dans des restaurants, mais aussi dans plusieurs autres lieux publics.  Je me souviens, par exemple, d’un pique-nique à Rivière-du-Loup, en route pour les Îles-de-la-Madeleine, où nous nous adonnions à ce plaisir innocent.  Le problème, c’est que nos garçons, eux, voyaient dans nos babillages (que nous souhaitons et croyions discrets!) une forme d’invasion dans la réalité de nos voisins de pique-nique.  Le temps de débattre le pour et le contre, nous devions repartir et nos histoires inventées n’ont pas trouvé de conclusion…

Marie a une amie, Johanne, qui vit avec les mots (au sens propre). Nous chantons dans le même ensemble vocal. J’aime sa voix, sa plume, sa rigueur, sa sensibilité, ses exaspérations et son humour. Je la connais, pour l’instant, dans son rôle de traductrice.  Pourtant, elle donne, et depuis longtemps, vie aux mots de bien d’autres façons.  Parmi les histoires inconnues qu’elle a déjà écrites, qui dorment dans ses tiroirs et qui n’ont pas encore trouvé d’éditeur, un recueil de nouvelles autour des gens qui travaillent et mangent dans un restaurant.

Les extraits en italique sont issus de son blogue(1), et présentent le contexte de la naissance de ce projet d’écriture.

« Québec, un soir d’avril 2005. Mon beau et moi sommes attablés au Paris-Brest, un restaurant planté sur la Grande Allée, à l’écart de l’animation. Nous aimons revenir ici en amoureux. La table est bonne, lambiance, feutrée le samedi soir et le service, impeccable. Les serveurs du Paris-Brest ne badinent pas avec les bonnes manières. Pour un peu, ils porteraient des gants.

On reconnaît notre jeu d’amoureux dans une réalité littéraire. Pas la nôtre, mais une réalité tout de même.  Ici, c’est le serveur qui est le personnage principal de l’imagination de Johanne.

« Le serveur sexagénaire qui veille sur nous ne fait pas exception : sérieux comme un pape, il maîtrise tous les codes du service et ne connaîtrait pas mieux le menu s’il l’avait lui-même composé. Je parie qu’il s’appelle Roger. Comme si la maison imposait à son personnel un devoir de réserve, Roger n’exprime aucune préférence pour une entrée ou un plat. Ris de veau ou carré d’agneau? Canard ou tartare? C’est comme vous le sentez Monsieur-Dame. »

Johanne vit avec les mots. Elle aimerait vivre de sa plume d’auteur et faire connaître ses propres mots.  Vivre comme dans « récolter quelques revenus grâce à ses histoires », mais également vivre comme dans « ses histoires prennent vie dans les yeux de lecteurs ».

« Viennent les entrées, puis les plats principaux, et Roger ne perd pas un gramme de sa superbe. On imagine un androïde plus émotif. Je demande à mon beau si, d’après lui, Roger dort au vestiaire la nuit venue. Ils le débranchent peut-être… »

Jusqu’à présent, les auteurs étaient des personnes que je pouvais voir et entendre dans les médias, sur les quatrièmes de couverture ou regarder aussi discrètement que possible quand je passais devant eux au Salon du livre.

« Au moment de nous laisser finir le vin, Roger attrape la corbeille de pain et dégaine une brosse ramasse-miettes : zip, zap, la brosse avale les miettes qui jonchent la nappe aussi prestement qu’un aspirateur central. Je m’émerveille : «T’as vu ça mon beau? Impressionnant!» »

Maintenant je peux discrètement me vanter d’être aller souper chez elle.  Nous avons convaincu son chum de devenir bénévole à Vues et voix.  Je jouerai peut-être même au golf avec eux cet été…

« — Ah ça, madame, y a pas mieux pour nettoyer facilement! J’en ai acheté une pour chez nous, mais j’ai pas pris le bon modèle. Ça prend des poils assez longs, comme celle-là, vous voyez? Je sais pas ce qu’on faisait avant d’avoir ces ptites brosses-là, moi je pourrais pas m’en passer… Voulez-vous l’essayer? »

Depuis mercredi dernier, le 27 mai, nous pouvons tous devenir des lecteurs de Johanne.  Elle a lancé une campagne de socio-financement où nous pouvons acheter un accès à son recueil de nouvelles.  Chaque mercredi pendant dix semaines, tout l’été, on pourra recevoir par courriel une nouvelle nouvelle! C’est bien le format « nouvelles »: tout un univers en quelques pages. C’est un format qui convient parfaitement à la balancelle, à la chaise de plage, au hamac ou au café au lait qu’on prend le temps de savourer.

« Disparu, l’androïde. Roger, mon vieux Roger, vient de reprendre toute la place en même temps que son identité. Ravie d’apprendre qu’il a une maison bien à lui et des goûts qui se discutent autant que les miens, j’essaie la brosse sur les deux ou trois miettes qu’il a bien voulu me laisser. Sans le savoir, Roger m’émerveille encore plus que sa brosse. J’aime bien quand l’anonymat laisse voir un jupon dhumanité. »

Les mercredis des prochaines semaines auront une saveur particulière.  J’anticipe déjà ces matins où, virtuellement, je me précipiterai sur ma tablette pour connaître l’histoire des gens d’une table d’à côté.

« J’ai passé le reste de la soirée à imaginer la vie des autres convives. «Tu vois mon beau, ces deux-là qui ont l’air d’avoir fait le tour de leur vie, ils ont peut-être passé un après-midi torride au lit et viennent se restaurer avant de reprendre leur marathon de sexe…» Les tables d’un restaurant sont autant d’îles aux cultures insoupçonnées. »

Elle s’appelle Johanne Tremblay.

 Son recueil s’intitule Un mercredi comme les autres (histoires et excès de table)

Le lien vers la campagne « Un mercredi comme les autres »: https://www.indiegogo.com/projects/un-mercredi-comme-les-autres/x/6486118#/story

Allez voir! C’est facile et sécuritaire. Hâtez-vous, la campagne (et la possibilité de s’abonner) se termine le 17 juin! Vous pouvez contribuer pour devenir, comme nous,  l’un de ses lecteurs assidus!

Bonne lecture…

Yvan et Marie

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(1) http://johannetremblayetmoi.com

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Des nouvelles du Pépère à vélo et de sa blonde/maîtresse – 24 mai 2015

Donner un dernier coup avant le grand jour…

« Dans mon temps », l’école commençait en septembre. 

Arrivé à la mi-mai, après tous ces mois de travaux et d’efforts, on commençait la grande révision en vue des examens de fin d’année. 

« Quelques années plus tard », je suis à nouveau dans cet esprit, mais dans un contexte bien différent.

En ce qui me concerne, j’ai toujours mesuré le temps qui passe en utilisant le calendrier  scolaire, puisque le monde de l’école et de l’apprentissage a toujours été le mien. Depuis bientôt deux ans, je suis revenue à un rythme plus personnel qui m’impose moins de pression, Dieu merci! J’apprécie grandement, notamment, les mois de mai – juin sans le stress lié aux examens du ministère: ne plus avoir à les préparer, les administrer ou à les corriger est une pure joie, j’avoue. Pourtant, depuis deux ans, mai – juin représentent encore  la « fin de l’année » et  apportent encore quelques émotions… Une image valant mille mots, celle qui me vient pour représenter ce moment de l’année est celle d’un grand entonnoir: le liquide qui s’y engouffre tourne lentement au début et, au fur et à mesure qu’il s’approche du goulot, de plus en plus rapidement.  Comme si s’amorçait maintenant le mouvement près du goulot…

Avec l’âge qui avance, se taper Montréal – Québec (en fait, dans le cadre du Défi-vélo pour le financement de la Maison des greffés Lina Cyr,  ce sera Longueuil – Lévis), 300 km en deux jours, ça ne s’improvise pas.  De septembre à maintenant, trois, quatre ou parfois cinq fois par semaine, j’ai sué, souvent abondamment, dans l’une des salles du centre ÉPIC.  Quand on est loin de l’événement final, on fait rarement le lien entre les coups de pédale d’un vélo de spinning en novembre et la fatigue qui nous tombera dessus, probablement autour de Lotbinière, le 11 juillet prochain.

La phase de financement s’est bien passée.  Tout en recueillant l’argent nécessaire, je me suis sensibilisé au phénomène du don d’organes.  À cet égard comme à bien d’autres, je considère que notre société est un peu loin de l’engagement et de l’implication individuelle.  On a une facilité à laisser ces responsabilités à nos gouvernements et à ne pas beaucoup réagir quand ces mêmes gouvernements coupent des soutiens.   À réfléchir avant de se mettre à agir…

J’ai décidé, il y a deux ans, de retourner chanter. Je le fais avec plaisir, avec l’Ensemble vocal Katimavik.  Depuis septembre, tous les mardis soirs (ou presque), de 19 h 30 à 22 heures, j’assiste aux répétitions: dans les locaux des Petits Chanteurs du Mont-Royal, réchauffement et travail d’apprentissage section par section des Requiem de Salieri et de Mozart.  À quelques reprises durant la semaine, pendant quelques heures, toute seule ou avec une collègue, à l’aide des fichiers d’apprentissage, j’ai appris les notes, la rythmique et les mots des sections ciblées pour la semaine suivante. Une fin de semaine intensive en novembre, plus trois dimanches en mars et avril pour fignoler les apprentissages. Ensuite, j’ai pratiqué, chez moi toujours, en écoutant les œuvres exécutées par un orchestre et un ensemble vocal connus, tentant de chanter la partition de mon pupitre avec l’ensemble.  Portion par portion.  Section par section. Un passage après l’autre. But visé: former un tout harmonieux. Avec les autres voix: celles des autres pupitres et celles des solistes. Avec les instruments de l’orchestre. Avec le chef. Surtout en regardant le chef, tout en respectant les nuances de la partition. Partition dont il faut se détacher, qu’il faut connaître et respecter!

Ma grande révision commence ce dimanche, 24 mai, par le Défi métropolitain, 100 km dans la région de Châteauguay.  J’aurai mon maillot de l’équipe du Pépère à vélo, je retrouverai plusieurs de la bande de l’année dernière,  nous roulerons en groupe parmi des centaines d’autres personnes et nous aurons le grand plaisir de rire et de souffrir (un peu) ensemble. 

Le dimanche suivant, nous serons dans la région du Lac Brome, pour un 90  km par monts et par vaux  pour soutenir la recherche contre le cancer qui prend la forme du myélome.

Le myélome c’est…

Un cancer mortel méconnu et de cause inconnue. Il résulte de l’accumulation de cellules anormales dans la moelle osseuse, où est produit notre sang. Lorsque survient une accumulation de cellules cancéreuses du myélome, plusieurs problèmes de santé peuvent apparaître, dont la destruction des os, des reins et des cellules normales de la moelle osseuse. Même si les nouveaux traitements arrivent désormais à prolonger la vie des patients, le myélome multiple demeure une maladie mortelle et incurable. (1)

Dans ce cas-ci, c’est surtout, un ami.  Pas un meilleur ami, mais quelqu’un que j’ai connu avec grand plaisir en jouant au volleyball et en regardant nos garçons respectifs jouer au hockey.  Benoit Larocque a un moral époustouflant.  Dans ses journées difficiles, il vous saluera avec ses yeux rieurs et un large sourire un peu fatigué.  Quelques coups de pédales, pour que ces yeux rieurs vivent encore longtemps.  

Ma grande révision est déjà amorcée. Depuis quelques mardis déjà, l’accent est mis sur les nuances et l’interprétation. Toute cette fin de semaine, nous sommes tous reclus quelque part en camp musical quelque part entre Morin Height et St-Adolphe et nous répétons intensivement. Vendredi soir, samedi et dimanche toute la journée à se saouler de musique. Répéter, peaufiner l’exécution.

En juin, il y aura deux autres éléments de révision.  D’abord la fameuse randonnée Montréal -Trois Rivières pour aller manger de la pizza.  Ça regarde bien pour le 6 juin.  On fera un message spécial à ce sujet, pour ceux et celles qui voudront se joindre à nous, pour rouler ou pour la pizza seulement!  Nous pensons également à une deuxième longue randonnée, où on roulerait de Longueuil à Nicolet, une répétition pour la première journée du défi-vélo de cette année.  La date n’a pas encore été fixée.

Après le camp, il restera deux répétitions régulières le mardi soir. Puis, trois répétitions avec orchestre et solistes (5, 6 et 10 juin) dans les locaux de répétition de la Place des Arts! Wow! Ce n’est pas rien… Trois fois trois heures seulement pour tout mettre ensemble. Finalement, le matin du 13 juin, la générale: dernière révision possible, en salle de concert, à la salle Claude-Champagne de l’Université de Montréal.

Puis arriveront les 10 et 11 juillet,  malgré les gants de vélo, les mains seront moites, le cœur battra un peu plus vite qu’à l’habitude.  Comme à l’époque, j’aurai le trac avant l’examen final…

Pour moi, le grand soir arrivera samedi 13 juin. À 19h30, tous ensemble, le chœur, les solistes et les musiciens professionnels. Les papillons au ventre que nous aurons tenté de contenir et de contrôler s’envoleront, enfin, au son des Requiem de Salieri et de Mozart.

Yvan et Marie

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(1)   http://cyclomyelome.org/accueil.php

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Des nouvelles du Pépère à vélo et de sa blonde/maîtresse – 17 mai 2015

Donner un coup de roue vers Ottawa

Pour moi, la région de l’Outaouais regorge de beaux souvenirs.  Y retourner pour aller voir les tulipes et surtout, visiter mon amie Francine et ma filleule Andréanne constitue une virée qui ne peut qu’être joyeuse.  Accessoirement, Marie suggère aussi d’aller voir l’exposition des œuvres d’Alex Colville au magnifique Musée des beaux-arts du Canada.  La vie heureuse en couple nécessite parfois quelques compromis.  Celui-ci n’est quand même pas si pénible. J’ai insisté: la visite d’une exposition dans un musée, c’est de la beauté pour les yeux, l’esprit et l’âme. Ça aussi, c’est joyeux! J’ai insisté, donc.

Il fut un temps où la route entre Montréal et Ottawa avait peu de secret pour moi.  Aujourd’hui, reprendre ce chemin nécessite encore le délicieux petit détour à Alfred.  Ceux et celles qui ne connaissent pas ce village méconnaissent probablement la Capitale de la patate frite (c’est moi qui lui accorde ce titre!).  Bien loin devant les « Nouveau Canada », La Belle Province ou autres Lafleur, il y a le Miss Alfred, avec ses casseaux de frites en bois à l’entrée.  À une quinzaine de kilomètres après être entrés en Ontario par la 417, vous prenez la sortie vers la 17 (sortie pour Hawkesburry, qu’on a manquée parce que c’est moi qui conduisait et que cette route a davantage de secrets pour moi! On a roulé jusqu’à la prochaine sortie et fait demi-tour. C’est dire que ça valait le détour!).  Une vingtaine de kilomètres plus loin, vous êtes au summum du snack à patates frites.  Ça vaut vraiment le détour, d’autant plus que la route 17 jusqu’à Ottawa offre aussi de jolis points de vue sur la rivière des Outaouais.

Bref contexte historique, avant d’entreprendre la visite des parterres remplis de tulipes:

Au mois de mai 1940, à la suite de l’invasion nazie des Pays-Bas, la reine Wilhelmina ainsi que la famille royale néerlandaise disparaissent, comme par magie, du Royaume-Uni. En juin de la même année, la princesse Juliana emmène ses filles, les princesses Beatrix et Irène, dans un lieu sûr au Canada. Voyageant par bateau, elles débarquent premièrement à Halifax, pour se rendre ensuite à Ottawa où la mère et les enfants sont logés, à Stornoway, lieu de la résidence officielle du chef de lopposition.

Le 2 mai 1945, après cinq ans d’exil au Canada, la princesse Juliana et ses enfants sont réunis avec la reine Wilhelmina dans la partie libérée des Pays-Bas. En signe de gratitude pour son séjour au Canada, et pour le rôle des soldats canadiens dans la libération de son pays natal, la princesse Juliana présente à la population canadienne un certain nombre de cadeaux, dont  100 000 bulbes de tulipes. L’année suivante, 20 500 bulbes supplémentaires sont expédiés au Canada, non sans la demande que ceux-ci soient plantés sur le terrain même de l’Hôpital Civic d’Ottawa.

Juliana, couronnée reine des Pays-Bas en 1948, n’a jamais cessé d’expédier des milliers de bulbes de tulipes en cadeau au Canada chaque année, durant son règne, lequel se termina avec son abdication en avril 1980 — période qui fit place au règne de la reine Beatrix (1).

Et la tradition perdure, pour notre plus grand bonheur. La promenade parmi les tulipes est un mélange d’ébahissement et de ravissement.  Plus évocatrices que les mots, voici quelques photos:

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Samedi matin, la journée s’annonce un peu grise.  Aller au musée devient une idée acceptable.  (Homme de peu de foi…).  Mais je suis un peu ouvert aux surprises.

Je connais Alex Colville parce que lorsque j’enseignais en quatrième année, j’utilisais le matériel « L’image de l’art » en arts plastiques. Toute une série de reproductions d’œuvres grand format que je pouvais présenter et faire connaître aux enfants. J’aimais bien celle-ci, Child and dog, justement (2):

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Alex Colville est un peintre canadien anglais (1920 – 2013).  Son pinceau m’a paru avoir été utilisé comme un appareil-photo, ce qui m’a souvent dérangé.  Il donne une vie à des événements de la vie de tous les jours.  Nous serons d’ailleurs accueillis par cette phrase de l’artiste:

« Ce sont les choses ordinaires qui me semblent importantes. »

Nous avons une appréciation légèrement différente de cette visite: là où Yvan est dérangé par le réalisme de Colville, j’ai été charmée par la précision, la technique utilisée – les couches de peinture minutieusement appliquées par toutes petites touches de pinceau – les lignes nettes et épurées. J’ai beaucoup apprécié ces « instants figés » et ces histoires suggérées, le mystère évoqué que l’on peut imaginer, à propos de ce qui s’est passé avant ou ce qui va suivre…

Je retiens cette phrase:

« En tant que bon réaliste, je devais réinventer le monde.« 

Un tableau m’a particulièrement touché.  Le cheval et le train nous montre cette confrontation qui semble mener à une incertitude dérangeante.  Produite en 1954, cette toile montre un parallèle sidérant avec les événements de la Place Tian’anmen qui auront lieu 35 ans plus tard, lorsqu’un étudiant confrontera des chars d’assaut.

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Colville et sa femme Rhoda, vivront ensemble 70 ans.  Davantage qu’une épouse, elle fut sa muse.  Il l’a d’ailleurs peinte à toutes les étapes de sa vie.  On sent dans la toile suivante tout l’amour qu’il avait pour elle:

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Toute une section de l’exposition est consacrée à l’importance de Rhoda dans l’œuvre de Colville.  Leur fille cadette raconte cet amour avec beaucoup d’émotion. Lorsqu’on visite une exposition à deux ou à plusieurs, on prend des chemins différents, on ne s’attarde pas aux mêmes tableaux, on ne lit pas tout au même rythme. Mais, au moment d’écouter le témoignage touchant d’Ann Kitz, la fille du couple, je me suis retrouvée juste derrière mon amoureux. Comme un besoin de me rapprocher…

Avant de reprendre la route, nous avons pris une bouchée sur une terrasse du marché.  Je rêve de vieillir longtemps avec Marie…

Yvan et Marie

_____

(1) http://tulipfestival.ca/fr/a-propos/histoire-du-patromonie-tulipe/

(2) Source œuvres de Colville: https://www.google.ca/search?q=colville&espv=2&biw=1366&bih=643&source=lnms&tbm=isch&sa=X&ei=Jc5XVeCCEsmtyATg14G4AQ&ved=0CAcQ_AUoAg#imgrc=_

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Des nouvelles du pépère à vélo et de sa blonde/maîtresse – 10 mai 2015

Donner une chance

Depuis janvier, nous sommes une infime partie d’un projet étonnant.  Chaque jeudi après-midi, nous nous pointons dans une ancienne cabane de parc, tout près du marché dans Hochelaga-Maisonneuve, afin de passer quelques heures avec des enfants et les accompagner dans leurs apprentissages scolaires. 

Cet endroit n’est désormais plus une cabane de parc.  Dans l’une des salles, il y a des violons, dans une autre des batteries, dans une autre encore des claviers ou des instruments à vent.  La salle du fond est plus grande; elle permet à plusieurs personnes de jouer ensemble, de créer un petit orchestre.  Cet édifice n’a plus l’air vieux, il a été rénové.  Il déborde d’enfants, de travailleurs sociaux, de psychoéducateurs, de professeurs de musique et de bénévoles accompagnateurs scolaires.  C’est le Garage à musique (GAM: quel acronyme fantastique!) qui relève de la Fondation du Docteur Julien:  http://www.fondationdrjulien.org/la-pédiatrie-sociale-en-communauté/alliance-droit-santé/le-garage-à-musique.aspx.

Ici, on n’est pas dans « Ho-Ma », qui voudrait bien devenir « tendance »!  On est dans « Hochelag ».  La vie y est difficile et pour plusieurs des parents et enfants que nous côtoyons, elle a été difficile depuis plusieurs générations. 

L’une des inspirations du GAM est l’approche du Système national d’orchestre pour les enfants et les jeunes du Venezuela (Il Sistema):

En 1975, le maestro José Antonio Abreu lançait l’orchestre symphonique national des jeunes au Venezuela. Il instaurait en même temps un mouvement social, en démocratisant l’enseignement de la musique et en mettant l’accent sur la pratique collective dans les milieux défavorisés. Ce modèle a été rapidement étendu à travers tout le pays pour devenir le Système national d’orchestre pour les enfants et les jeunes du Venezuela(1).  L’enfant musicien accroît sa propre estime de soi, crée un mode d’expression pacifique, manifeste de la discipline, de la concentration, de la persévérance, de la créativité, mais surtout, il développe de la motricité fine et affiche le niveau de ses ambitions. La pratique collective de la musique valorise chez l’enfant la sociabilité, l’esprit d’équipe, le leadership, la générosité et l’harmonie. Toutes ses qualités le soutiennent dans son apprentissage scolaire et au cours des étapes de sa vie(2).

Heureusement pour l’humanité, mon implication ne touche pas la musique. Hahahahahahaha!

L’autre volet, au GAM, c’est l’accompagnement scolaire. Plus que de l’aide aux devoirs: parce que ça, il s’en fait déjà dans les écoles et ailleurs. L’idée, c’est de tisser des liens, d’établir une relation, de donner ou de redonner confiance, de faire voir et vivre des réussites, de tenter de toucher. Pendant une heure, tendre ou donner la main. Demander comment ça va. Prendre le pouls, deviner et décoder la mauvaise humeur, les frustrations accumulées, la fatigue, les colères, les difficultés. Souligner les progrès à gros traits. Être disponible. Les enfants qui viennent aux périodes d’accompagnement scolaire du GAM sont référés, dans le contexte de la pédiatrie sociale: ils arrivent avec une histoire et un profil. Nous, on s’inscrit dans ce mouvement collectif d’engagement, à notre toute petite échelle. Chaque semaine, durant l’année scolaire, beau temps, mauvais temps.

Notre petit rôle est de faire vivre de petites victoires en français et en mathématiques à des enfants pour qui ces sujets sont souvent source d’échecs.  La musique donne à ces jeunes l’envie de faire un peu confiance à des adultes.  La période d’accompagnement scolaire va dans le même sens. La porte donnant accès à leur monde n’est jamais grande ouverte.  On y pénètre à tout petits pas, en s’excusant presque d’être entré.  Bâtir une relation avec ces enfants relève du château de cartes: on doit y aller tout doucement et ne pas se décourager quand tout tombe.  On remet deux cartes ensemble et on recommence.

On se rend vite compte de la rigueur, du recul et de l’humilité nécessaires quand le château s’effondre. Parce qu’il tombe, éventuellement. D’une semaine à l’autre, on espère, on s’investit, on s’engage et on est parfois déçu. Frustré. Étonné. Perplexe.  

Prises de conscience: il y a des formes de bénévolat où l’on s’implique par plaisir. La satisfaction personnelle est égale ou supérieure au service rendu.  Ce que je fais pour Vues et Voix  entre dans cette catégorie. Je le fais pour moi et au final, pour l’organisme, c’est tant mieux.  Ce que nous faisons au GAM est d’un autre ordre. Mon propre besoin de réalisation n’importe plus face à l’enfant avec qui je m’assois. Je le prends comme il est et s’il vient. J’offre de la constance, de la patience, parfois des comment-faire.  Je propose de l’espoir. C’est volatil… Parfois ingrat.

Pour Marie et moi, les premiers moments du retour à la maison sont souvent silencieux: nous sommes très satisfaits et/ou très vides.  Les liens que nous tentons de construire sont encore si fragiles…  Malgré beaucoup d’efforts, il y a de ces après-midi sans magie et d’autres, au contraire, où eux et nous gagnons une coupe Stanley.  Mais peu importe comment une rencontre s’est passée, nous serons là le jeudi suivant et l’autre jeudi d’après.  En échange d’un sourire en coin et de yeux surpris, nous leur offrons la constance de notre présence du jeudi. 

On se donne une chance, eux et nous, de grandir autrement…

Yvan et Marie

  1. Fundación del Estado para el Sistema Nacional de las Orquestas Juveniles e Infantiles de Venezuela, (Fesnojiv)
  2. http://www.fondationdrjulien.org/la-pédiatrie-sociale-en-communauté/alliance-droit-santé/le-garage-à-musique/origines.aspx
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Des nouvelles du Pépère à vélo et de sa blonde/maîtresse – 3 mai 2015

Donner des nouvelles…

 Le 28 février dernier, nous écrivions le billet « Couper le cordon ».

Voici la suite, donc.

Vendredi 1er mai, 9 heures.

Boîtes de livres, boîtes de bibelots et d’objets divers, de vêtements, d’autres vêtements sur des cintres dans des sacs verts, un ancien bureau de travail nouvellement acheté, quelques chaises, un lit IKEA neuf à monter.  Ce n’était pas un gros déménagement, mais néanmoins un déménagement important.  Félix est parti dans son premier appartement. Félix est parti de chez nous.

Appartement vieillot au troisième étage d’un immeuble dans un quartier mi-tranquille, mi-actif (c’est tout de même étonnant de qualifier ainsi le Plateau!), pas très loin à pied de plusieurs lieux intéressants.  Il aura du plaisir à découvrir son nouvel environnement.

Après quelques allers-retours, je réalise que mon entraînement de tout l’hiver est à peine suffisant pour monter tous ces effets au troisième.  Par bonheur, Antoine et Chloé. son amoureuse, étaient présents pour transporter tout ça allègrement! Heureusement, si le souffle est un peu court arrivé en haut, je reprends vite la forme et retourne en bas.  Probablement qu’après une longue journée à l’université ou au travail, monter son épicerie dans ce sanctuaire sera un exercice pas banal qui lui évitera pendant quelque temps de s’inscrire à un gymnase!

Un premier appartement, c’est toujours un mélange d’espaces charmants et de peinture qui s’écaille, de cuisinière qui n’a pas vécu de nettoyage depuis longtemps (genre jamais?) et d’amis qui viennent donner un coup de main et boire une bière.  Celui-ci répond à toutes ces caractéristiques.  Dans ce cas précis, on ajoute quelques colocs sympathiques. En après-midi, chaque torchon avait une main, une bouteille de nettoyant et beaucoup d’enthousiasme:  une ruche d’abeilles qui redonnent transparence aux fenêtres, éclat à la salle de bain et fraîcheur à la cuisine. Quelques-uns bouchent des trous avec du plâtre puis appliquent une première couche de peinture dans certaines des pièces. Mon frère dirige les opérations pour monter le lit IKÉA; Dieu merci!  Si nous avions dû le faire nous-mêmes, nous y serions encore… 😉

J’ai dû manquer le dépôt de la loi qui changeait les règles des déménagements.  En fin d’après-midi, mon estomac lance à mon cerveau l’appel de la pizza et de la bière.  Je ne suis pas le seul à sentir l’énergie diminuer et l’appétit grandir.  Surprise! Sur une table de service s’avancent plusieurs belles assiettes avec fromages, viandes froides, olives variées, baguette et vin (et bière).  Vive cette nouvelle loi!

En début de soirée, Marie veille à organiser la chambre de Félix.  C’est peut-être la dernière fois qu’elle fera son lit… et la seule fois dans ce nouvel appartement.  Satisfaite du résultat, ayant eu l’évaluation et reçu le sceau de satisfaction de Martine, Julie et surtout Félix, on rentre chez nous.

Jusqu’à ce moment fatidique, j’avais bien fait ça. Probablement dû à la concentration exigée par les tâches de nettoyage et les rencontres avec des jeunes formidables.  Mais bon. J’ai pleuré en partant.  Ma tête comprend. Elle est heureuse pour Félix, même. Mais mon cœur de mère a craqué. On ne se refait pas…

Le match de hockey s’est terminé au début de la deuxième période de prolongation.  Je monte me coucher vers 23h30. 

La porte de la chambre de Félix, (pour quelque temps, c’est encore sa chambre), est ouverte.  Les murs sont dégarnis, son bureau et l’étagère adjacente sont vides,  son ancien lit simple attend quelqu’un qui ne viendra pas, rien ne traîne sur le plancher. 

La vie de Félix vient de prendre un nouveau virage.  La nôtre aussi…

Aujourd’hui, samedi, j’ai fait ce que ma mère a fait au lendemain de mon départ en appartement: j’ai pleuré (encore! Je vais finir par arrêter, c’est certain…) et j’ai fait du ménage! Le printemps se prête bien à ces changements. Je cite ici Nicole Bordeleau, qui propose régulièrement pensées et leçons de vie: 

« Hier matin, j’observais des travailleurs tailler les branches mortes des arbres près de la maison. 
Sur le coup, ça m’a chagrinée de voir ces arbres être dénudés.
Mais, j’ai compris que ces branches […] appartenaient au passé et leur poids nuisait à l’arbre et à la croissance de nouvelles pousses. […]
Si je refuse de lâcher prise, si mes deux mains restent agrippées au passé et qu’elles refusent de s’ouvrir, il ne peut y avoir de renouveau dans ma vie.
À l’image de ces arbres, si on accepte de laisser partir ce qui doit partir, on revit! »

 Yvan et Marie

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Des nouvelles du Pépère à vélo et de sa blonde/maîtresse – 26 avril 2015

Donner un cadeau

(ou le recevoir, c’est selon!)

C’était un cadeau pour Marie.  En cherchant des idées de cadeau pour Noël, je trouve ce spectacle de Fred Pellerin, De peigne et de misère.  Nous sommes en novembre, le spectacle est en avril.  Marie adore Fred Pellerin.  J’achète.  Ce sera son cadeau d’anniversaire pour le 21 mars.  J’imprime les billets et me prépare à bloquer la date sur le calendrier.

Nous sommes en novembre 2013. Je regarde le calendrier de 2014.  Le 25 avril N’EST PAS UN SAMEDI comme c’est bien écrit sur les billets mais un vendredi!  Je regarde la date complète sur les billets… 25 avril 2015.  J’ai donc acheté un cadeau d’anniversaire pour Marie, 17 mois avant la tenue du spectacle… Quelle prévoyance, ou quelle distraction! C’est selon!

C’est aujourd’hui le 25 avril 2015. 

C’est ce soir que nous verrons enfin Fred Pellerin.  Ça fait 17 mois que je lui souhaite plein de bonnes choses pour qu’il puisse être en forme au théâtre Maisonneuve ce soir.  Plus que neuf heures à tenir…  Les billets étaient sur l’épingle de la cuisine pendant tout ce temps. (C’est là où l’on range les billets de spectacles et les rappels de rendez-vous importants: un grosse pince à linge « aide-mémoire », suspendue au mur. La pince-mémoire.) On pourra enfin s’en servir.  Les feuilles où on a les imprimés n’ont même pas jauni.  Nous les avions quand même bien protégées du soleil, de la pluie, des inondations et surtout du froid de l’hiver … et du printemps.  Au moment de cet achat, Denis Coderre n’était maire que depuis trois semaines et le débat sur la Charte de la laïcité faisait rage.

J’espère seulement que je n’ai pas fait installer les pneus d’été trop vite cette semaine.  Si c’était nous qui ne pouvions être à ce rendez-vous?

On se souhaite que tout ira bien et on vous revient à notre retour… après le spectacle…

23h09   Heure du retour à la maison.

Maudit beau cadeau! Une soirée complète de poésie, de contes et de rêves éveillés. La salle Maisonneuve de la Place des Arts était pleine. Remplie de gens qui, comme nous, ont dû se procurer leurs billets il y a bien longtemps… J’ai vérifié autour de nous, des histoires d’achat semblables à la nôtre, consciemment ou non.

Les lumières baissent.  Il est là, nous aussi.  Le rendez-vous a lieu.  Fred Pellerin est un jongleur: il lance les mots, les rattrape juste à temps, en fabrique des nouveaux, crée l’illusion, surprend, étonne, fait rire et sourire. Je pense à Sol et à Yvon Deschamps, il est fabuleux que dans notre coin francophone de l’Amérique du Nord, nous puissions vivre en français des spectacles comme celui-ci où le charme est essentiellement constitué d’un imaginaire renversant, coloré par une si belle langue. Une soirée complète avec les yeux grands ouverts, comme au cirque, devant les jongleurs et les trapézistes, mais sans la peur. Juste l’émerveillement. Et l’espoir d’un meilleur monde.

Parmi le public, Gilles Vigneault, autre poète et Claude Robinson, qui représente la dignité et la persévérance. J’apprends à me tenir debout, la chanson offerte en rappel, prenait tout son sens…

Notre prochaine rencontre avec Fred Pellerin est déjà prévue, ce sera même avant la fin de cette année.  Il fera voltiger des histoires de Noël sur la musique de l’OSM.  Pour quelques heures, nous redeviendrons des enfants devant le sapin…

Yvan et Marie

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Des nouvelles du Pépère à vélo et de sa blonde/maîtresse – 19 avril 2015

Donner du temps…

Cette semaine c’était la semaine de l’action bénévole.  Ah bon! Je l’ai su quand j’ai lu dans La Presse de lundi cette jolie lettre de M. Jean Brière.  J’y reviendrai plus loin.

Personnellement, je me sens plus engagé socialement que bénévole.  J’aime faire ma part auprès d’organismes qui rendent la vie un peu meilleure.  L’un de nos engagements se fait dans les locaux de Vues et Voix (anciennement la Magnétothèque).  Nous vous en avons parlé à deux reprises en janvier et février derniers, en vous racontant nos premiers pas comme animateurs à l’émission Kiosque Magazine du Canal M.  Mais notre implication pour cet organisme a aussi pris une autre forme, un peu plus modeste.

Nous avons toujours aimé lire.  Quand les enfants étaient jeunes, j’ai découvert le plaisir de la lecture à haute voix (Marie connaissait déjà ce plaisir à cause de son travail d’enseignante).  Dans notre rituel du dodo, il y avait, chaque soir, sur le lit d’Antoine ou de Félix, la lecture d’un livre.  Au début, ce furent des livres pour jeunes enfants, puis plus tard, des bandes dessinées et finalement les Harry Potter.  Cette routine s’est poursuivie jusqu’au moment où Félix et Antoine ont commencé à lire plus sérieusement par eux-mêmes et trouvé que la période de lecture avant d’aller dormir leur appartenait en propre.

Lire à haute voix est, pour moi, une façon de faire connaître des mondes, de partager rêves et réalités, de créer et d’entretenir des liens impliquant promiscuité, chaleur, amour et sécurité. Je l’ai fait en classe avec les petits et les grands, en formation avec des enseignants et avec mes enfants. Le soir venu, il m’est même arrivé de m’assoupir en lisant aux garçons… qui me faisaient sursauter en me disant: « Maman, tu dors! »

Quand nous avons approché Vues et voix, nous cherchions à offrir ce plaisir de la lecture à haute voix à des personnes qui ne peuvent plus ou pas lire par eux-mêmes à cause de problèmes de vue, d’apprentissage ou de manipulation des livres.  Nous avons alors découvert que plusieurs personnes ont déjà choisi cette forme d’implication et la maintiennent depuis très longtemps.  Actuellement, il n’y a donc pas de place comme lecteur, même si ce rôle peut parfois être assez exigeant.  Pensez par exemple au dernier livre de Ken Follet, Aux portes de l’éternité: 1 250 pages qui doivent être lues par la même personne (on veut éviter des changements de voix dans un même livre) en un temps raisonnablement court, afin que les personnes intéressées puissent « écouter » cette lecture, peu après la parution du livre.  Au final, le lecteur bénévole aura dû consacrer au moins 24 heures de lecture pour compléter son travail, soit l’équivalent d’une journée complète de lecture sans arrêt!

Il n’y a donc pas de place de « lecteurs », pour le moment.  Qu’à cela ne tienne, on nous a proposé le rôle de  réviseurs:  notre tâche consiste à écouter la lecture d’un livre et à identifier les différences entre la lecture et le contenu du livre, dans le but éventuel qu’elles soient reprises et corrigées.  Il s’agit d’un contrôle de la qualité, pour assurer aux « auditeurs » une lecture en tous points conforme au livre.  S’ajoutent également quelques manipulations dans le logiciel, qui permettront à l’usager de naviguer aisément dans sa lecture.

Pour le vedettariat, on repassera; c’est un rôle somme toute modeste, visant la qualité du produit final. Je te rappelle, bénévole préféré, qu’on ne fait pas ça pour le vedettariat!

Mais bon! On a aussi la radio!!! Cette radio non plus d’ailleurs, ne nous apportera pas le vedettariat. Ce n’est pas le but visé. On prend plaisir à se préparer rigoureusement, chaque semaine: d’abord, choisir l’article, ensuite le retravailler afin qu’il entre dans les temps, se chronométrer et se pratiquer à le relire pour que la lecture soit naturelle et fluide. Lors de l’enregistrement en direct, le mardi matin, retrouver les collègues avec de plus en plus de plaisir et animer l’émission dans la joie. Mais surtout, prendre conscience qu’en bout de ligne, il y a des gens qui écoutent et qui apprécient, pour qui ce lien est important!

Grand constat après deux mois de ce travail de réviseur, les lecteurs de Vues et voix sont vraiment de très bons lecteurs.  C’est un réel plaisir de se faire raconter des livres par eux.  Je peux facilement imaginer que certains auditeurs choisiront un livre à cause de son contenu, mais aussi à cause de la voix du lecteur.

Comme je le mentionnais au début de cette chronique, lundi, M. Jean Brière commence son texte ainsi:  « J’adore la lecture. Je lis des biographies, des romans, des essais, des magazines sans oublier les journaux. Je lis souvent et partout, en marchant ou en me rasant. Je lis même dans l’obscurité. Une explication s’impose, je suis aveugle ! En fait, mes livres sont des enregistrements sonores réalisés par des femmes et des hommes qui lisent bénévolement toutes sortes de documents au profit des personnes incapables de lire l’imprimé. »

Par ces quelques lignes, mon engagement s’ancrait tout à coup concrètement dans la réalité.  Les yeux et la voix de centaines de personnes permettent à des milliers d’autres personnes de continuer à apprendre, à rire, à rêver.  Au-delà des remerciements des responsables de Vues et voix, ce témoignage a donné une jolie couleur à cette semaine de l’action bénévole.

Mais… J’ai quand même hâte de devenir un lecteur…

Moi aussi! Mardi matin, levant un verre de mimosa gentiment offert aux bénévoles, j’ai manifesté discrètement mon intérêt pour la lecture de littérature de jeunesse à la responsable. Certaine que je ne m’endormirais pas!

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 Yvan et Marie

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