CHANGEMENT DE PROGRAMME
C’était, cette semaine, la semaine des enseignant.e.s.
Évidemment, c’est un monde auquel je suis plutôt sensible, y ayant baigné, vécu et contribué pas mal.
Je retourne cette année dans plusieurs classes pour lire aux élèves. Mercredi après-midi, j’étais à l’école Wilfrid-Pelletier, où nos fils sont allés au primaire. J’ai offert à l’enseignante de 2e année de lire des histoires en lien avec les thèmes de ses modules de recherche. Mercredi après-midi, tout comme la semaine précédente, je devais lire deux livres d’images choisis sur le thème de l’espace.
L’idée de base, c’est de lire les livres, en lecture interactive, c’est-à-dire en posant des questions, en faisant faire des hypothèses, en provoquant des réactions. Au fur et à mesure, on complète avec les enfants un grand tableau comparatif et au final, ils sont invités à identifier leur livre préféré et à expliquer leur choix et leurs motivations en petits groupes.
Ça, c’est ce qui était planifié. Sur papier. C’est tellement important, une bonne planification. Et ô combien utile… En principe.
Dans la vraie vie, il a fallu s’adapter!
Imaginez la scène: dans la classe, les enfants sont assis en demi-cercle, certains sur les chaises, d’autres par terre, quelques-uns sur d’immenses poufs. Pendant la lecture du premier livre, au beau milieu d’une discussion passionnante, on entend un bruit liquide et insolite. Tous les regards se tournent vers l’origine du son, qui reprend: A. assis sur sa chaise, vomit entre ses jambes tout ce qu’il a mangé dernièrement. Piteux, il n’a aucun contrôle sur ce qui lui arrive et surtout, qui n’arrête pas. Éclaboussures sur lui, sur le plancher, sur ce qui l’entoure. Panique dans les rangs, les autres enfants réalisent ce qui se passent, se lèvent et, dégoûtés, s’éloignent de la source du bruit (qui continue à dégobiller), oubliant toutes leurs bases d’empathie, néanmoins bien apprises.
Et c’est là que toute la magie opère. Un regard et quelques mots entre nous deux ont suffit. Lynda, l’enseignante a pris les choses en main. Calmement, elle a rassemblé ses autres poussins, les a rapidement faits sortir du local, a communiqué à l’intercom avec la secrétaire pour aviser le concierge et lui demander de venir ramasser le dégât et a emmené les élèves au premier étage à la salle de toilette, pendant que je m’occupais d’A. (le pauvre…). On a appelé la maman, qui est venue récupérer le porteur du virus, bien sûr. J’ai terminé la lecture du premier livre dans une autre classe (dont les élèves étaient partis au gymnase), laissant le temps au concierge de désinfecter la zone sinistrée. Nous avons pu, globalement, retrouver un peu le fil de l’histoire et profiter de l’occasion pour nommer les émotions vécues, les nôtres tout autant que celles du pauvre A.
Une fois revenus dans la salle de classe nettoyée, on s’est réinstallé, prenant bien soin de laisser vacante la section encore humide et la fenêtre ouverte… Le tableau fut complété et la seconde histoire lue, mais beaucoup plus rapidement que ce qui était prévu! Et l’enseignante a reporté l’activité d’appréciation au lendemain matin. Elle en a profité pour faire nettoyer le dessus de chacun des pupitres et a vaporisé du désinfectant sur tout ce qui risquait d’être atteint. Les petits, calmement, ont pris le temps de vérifier s’ils avaient, dans leur sac, tout le nécessaire pour les leçons du soir et les activités du lendemain, se sont habillés pour aller jouer dehors et m’ont raconté leurs petites histoires de vie.
Tout mon respect, toute mon admiration pour ces hommes et ces femmes de cœur qui, non seulement planifient, enseignent, corrigent, évaluent, organisent, gèrent, mais aussi écoutent, calment, soignent, consolent et prennent soin du cœur de chacun de leurs élèves , tout en s’adaptant aux mille imprévus qui surviennent, inexorablement.
Merci et bravo les enseignant.e.s!
Marie
C’est un événement qui peut arriver et tant d’autres qui n’apparaissent pas à la description de tâche des enseignantes. En travaillant avec des humains, l’enseignante apprend aux enfants ce que c’est qu’être humain et tout ce qui s’en suit…Mais cela n’est jamais comptabilisé dans sa tâche. Hommage aux enseignantes qui jour après jour remplissent une fonction humanitaire.