Des nouvelles du Pépère à vélo et de sa blonde/maîtresse – 10 avril 2016

Prolonger le temps

Nous avons déjà évoqué ce livre, qu’Émile, l’ami de Félix, nous a offert à Noël. Un livre coup de cœur (l’expression convient tout à fait). Nous l’avons tous les deux maintenant terminé.

Liens entre la fiction et la réalité.

L’histoire débute par une « presque mort ».  Simon, 20 ans, jeune surfeur plein de vie, subit un accident de voiture. Tout s’arrête brusquement sur une route du Nord de la France, après une session matinale de surf énergique sur des vagues impressionnantes. Bruit assourdissant de l’océan, cris d’exubérance et silence de plomb.

Ainsi commence le livre « Réparer les vivants » de Maylis De Kerangal*. Un récit essoufflant qui se déroule pendant précisément  24 heures, sur la vie, la mort, la mort et la vie.  L’écriture, surprenante, faite de longues phrases qui nous tiennent en haleine, nous plonge dans le tourbillon des actions, des réflexions, de la douleur et de l’avenir de tous les personnages touchés par cette « presque mort ».

Une fois à l’hôpital, les responsables du département des dons d’organes reconnaissent que la vie de Simon est presque terminée mais qu’il pourrait permettre à d’autres de prolonger la leur.  La course contre la montre commence:  trouver les parents, les rencontrer, leur annoncer la nouvelle, leur expliquer les possibilités et les conséquences, les laisser prendre leur décision en leur faisant comprendre l’urgence de la situation, identifier des receveurs compatibles et potentiels, les trouver, leur parler et leur permettre enfin d’envisager autrement leur vie.

C’est un livre choc, qui nous fait vivre la situation du don d’organes à travers les yeux et les réflexions de chacune des personnes touchées par cet événement.  Comme parent, j’ai trouvé cela très difficile à lire.  On réalise brutalement à quel point  il est relativement facile de signer sa carte de dons d’organes, d’en parler à ses proches mais comment, devant la réalité froide, il devient autrement plus difficile de donner son accord aux professionnels pour qu’une personne aimée, particulièrement son enfant, soit offerte, comme des parcelles de vie, à d’autres.  Et à l’issue de ce processus, il y a ceux qui reçoivent ces organes, pour qui la vie a soudain la permission d’avoir un autre futur.

J’ai tout aimé de ce livre: l’écriture vive, soutenue, les personnages plus vrais que nature, leur quotidien et cette part de vie qui dépasse l’ordinaire, dans les circonstances. Tout. Je vous en recommande chaudement la lecture.

J’ai eu la chance, récemment, d’être invitée à l’enregistrement de l’émission Des livres plein les oreilles à Canal M de Vues et Voix, pour parler de lecture avec l’animatrice Clothilde Seille et Yves Nadon, cet enseignant à la retraite, auteur et éditeur que j’aime tant.  On nous demandait de parler d’un livre lu et marquant; j’ai eu, (trop rapidement) à la fin de notre intervention, l’occasion de parler un peu de Réparer les vivants et d’en lire un extrait. Ce sera diffusé jeudi prochain le 14 avril à 12h et en rediffusion à 16h, vendredi le 15 avril à 15h, samedi le 16 avril à 14h et dimanche le 17 avril à 12h.

L’extrait lu, donc:

« Le cœur de Simon migrait dans un autre endroit du pays, ses reins, son foie et ses poumons gagnaient d’autres provinces, ils filaient vers d’autres corps. Que subsistera-t-il, dans cet éclatement, de l’unité de son fils? Comment raccorder sa mémoire singulière à ce corps diffracté? Qu’en sera-t-il de sa présence, de son reflet sur Terre, de son fantôme? Ces questions tournoient autour d’elle comme des cerceaux bouillants puis le visage de Simon se forme devant ses yeux, intact et unique. Il est irréductible, c’est lui. Elle ressent un calme profond. La nuit brûle au-dehors comme un désert de gypse. »

Dans la vraie vie, le Centre de prélèvement d’organes de l’Hôpital Sacré-Cœur, projet-pilote lancé en 2013 sous la direction du docteur Pierre Marsolais, a donné un élan majeur au don d’organes.  Selon Le Devoir, en 2015, le Québec a connu une année sans précédent en matière de dons d’organes, atteignant un record historique de donneurs et de patients transplantés, en hausse de 45 % depuis 2010.

Pourtant, au lieu de confirmer l’apport d’un tel Centre pour notre société, on craint pour sa survie.  Des analyses montreraient qu’il coûterait trop cher.  Dans un article récent de La Presse, on souligne toutefois que chacune des greffes réussie permet d’économiser des sommes importantes en soin de santé mais aussi que chaque vie sauvée est une victoire incommensurable.

La Maison des greffés Lina Cyr est un maillon crucial de ces victoires pour les gens vivant à l’extérieur de Montréal.  Avec une centaine de cyclistes, dont quatre autres membres de l’équipe du Pépère à vélo, je roulerai pour soutenir cette cause les 7 et 8 juillet prochain… Pour participer à ma façon et contribuer à offrir une chance de prolonger le temps, et… réparer les vivants.

Dans une semaine, du 17 au 24 avril 2016, se tiendra  la Semaine nationale du don d’organes et de tissus. Pour visionner plusieurs témoignages touchants de gens greffés ou en attente d’une greffe, c’est par ici!

Yvan et Marie

 * Réparer les vivants, Maylis de Kerangal, Gallimard, Folio, 2014,                                  ISBN: 978-2-07-046236-0

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About Yvan Deslauriers

Je suis le Pépère à vélo. Avec Marie, ma blonde/maîtresse, nous sommes impliqués cette année, en 2019, au soutien de la recherche sur le cancer par l’entremise de la Fondation Myélome Canada et du financement de la Maison des greffés Lina Cyr. Cette implication se concrétise par la participation dans l’événement vélo pour Yvan et par la rédaction de ce blogue pour Marie et Yvan.
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3 Responses to Des nouvelles du Pépère à vélo et de sa blonde/maîtresse – 10 avril 2016

  1. Avatar de gelgen gelgen dit :

    Yvan! Ce sera mon premier Défi vélo pour la Maison des greffés, cet été. Je suis contente de lire que j’y aurai plus d’un ami :^)

    Au plaisir!

    Geneviève (la lutine)

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