LE MONDE APPARTIENT À CEUX QUI SE LÈVENT TÔT
ET PARFOIS, UN PETIT PEU TARD
Deux jours de suite cette semaine, nous avons mis en application cette expression. Billet inspiré de ces deux matinées (et d’une soirée) qui nous ont permis de voir le monde sous un autre angle…
Vendredi 20 juin, 3h45 du matin
La pièce Épilogue du dernier album de Serge Fiori envahit doucement la chambre, en guise de réveille-matin. C’est la nuit, tout le monde dort, sauf Yvan, que Biscotte vient de réveiller en miaulant avec insistance. L’été, Biscotte « ne fait pas ses nuits », elle ME demande pour sortir entre 3h00 et 4h00. Je suis curieux de savoir comment elle peut réussir à réveiller Antoine quand Marie et moi sommes en vacances hors Anjou… Rupture abrupte et lever du corps inhabituelle: ce matin, nous allons assister à l’enregistrement exceptionnellement public de la dernière émission de la saison de C’est pas trop tôt, dans un corridor de la Place des Arts. Le temps de s’habiller, de manger un fruit, de boire un premier café et, les yeux presqu’ouverts, nous sommes partis. À cette heure, aux aurores, il n’y a pas de problèmes de circulation; le même parcours, à l’époque du travail me prenait facilement le double du temps de ce matin. On peut observer que le ciel commence à changer de couleurs, on ne sait pas vraiment si les gens qui travaillent à la voirie ou à l’entretien du stationnement intérieur commencent ou terminent leur quart de travail.
À 5 heures, les portes souterraines qui mènent du Complexe Desjardins à la Place des Arts sont verrouillées; le métro n’est même pas encore fonctionnel! Nous entrons finalement par la porte extérieure, rue Sainte-Catherine. Martine et Julie seront fières de nous: à la surprise même des gens de l’émission, nous sommes les premiers arrivés … à 5h05!!!
Le contraste entre la tranquillité de la rue et le fourmillement feutré de l’intérieur est frappant. L’équipe se prépare: les gens de la technique, les chroniqueurs, Marie-France Bazzo, tout le monde est affairé et concentré, mais tout de même accueillant. Drôle d’endroit quand même, pour enregistrer une émission: directement dans le corridor qui mène à la rue Ste-Catherine, presque en face de la salle Maisonneuve. Quelques minutes pour saluer M. Desautels, puisque Benoit, mon frère, est devenu l’un de ses collaborateurs sur la route.
Rapidement, l’émission démarre. L’équipe discute à bâtons rompus autour d’une table qui pourrait être une table de cuisine encombrée de papiers et de micros. On a l’impression d’être des enfants qui se sont levés en cachette pour écouter (et voir) les grands. La première heure, il y a bien peu de gens autour de nous. Le ton est plus intime, chaleureux. Les choses sont dites presque sur le ton de la confidence. J’avoue! Je suis une « groupie ». J’ai adoré avoir accès à l’envers du décor, comme une souris, appréciant tout autant la fabrication de cette émission qui nous accompagne intimement chaque matin que la connivence qui anime les gens de cette solide équipe.
Amusant: à 5 h 40, c’est le segment du Club des lève-tôt et la personne du jour est présente. Nous sommes arrivés en même temps et j’ai l’impression de la connaître. Myriam Binette est quelqu’un qui vit sa vie à plein: elle travaillait comme fleuriste au Marché Jean-Talon (ben oui, on la connait, on lui a déjà acheté des plantes!) avant de s’exiler aux Îles-de-la-Madeleine (elle a travaillé à la brasserie artisanale À l’abri de la tempête!) et de revenir à Montréal pour s’impliquer en éducation avec les étudiants dont le système ne veut plus. On la reverra sans doute cet été aux Îles, puisqu’elle m’a dit où elle habite…
Pendant près de quatre heures, les chroniques et les invités défilent et nous assistons aux présentations et aux entrevues, tels des témoins privilégiés. J’ai été impressionnée par la rigueur journalistique de Marie-France Bazzo, le professionnalisme d’Annie Desrochers, l’humour et l’à-propos de Stéphane Leclerc (qui nous a fait danser sur du Stromae!), la dégaine de Jean-Patrick Balleux, la grâce de Véronique Mayrand, la spontanéité de Yves Desautels, l’humanité d’Hugo Lavoie, la pertinence des propos de François Cardinal, Jean-Sébastien Bernatchez et Jacques Beauchamp, le cynisme et le sens de la compétition de Fred Savard et François Gagnon ainsi que la vivacité d’esprit de Jean-René Dufort.
Parmi les invités, j’ai particulièrement aimé entendre Denis Coderre et Richard Bergeron parler de Montréal avec autant de… complicité, disons-le. Manifestement, ils travaillent en équipe, mettant à profit le meilleur d’eux-mêmes. Ça fait changement des discours un peu vides de la campagne électorale d’octobre dernier. Marcel Côté aurait eu sa place avec ces deux larrons, triste décès.
Tous les matins, en semaine, les voix de ces animateurs et chroniqueurs nous accompagnent. On les écoute, attentivement ou distraitement, selon ce qu’on a besoin d’entendre et de savoir… Ce matin, au fur et à mesure que le jour s’installait, nous étions de plus en plus nombreux à observer, écouter et participer concrètement à ce rituel matinal… pendant que des milliers d’autres émergeaient à peine du sommeil. Une vraie chance! C’est là qu’on réalise que chacun chez soi ou dans sa voiture, on fait partie d’une grande famille radio-canadienne, tous unis autour d’une radio actuelle et énergique. Souhaitons que les coupures de budget ne mettront pas en péril cet élément essentiel à la croissance de notre belle langue française en Amérique.
Il est maintenant un peu plus de vingt heures… Faut que j’aille me coucher! Demain matin, à l’aube, on remet ça!
Samedi 21 juin, 3h00 du matin
Et rebelote! C’est reparti… Et encore plus tôt, ce matin. Cette fois-ci, Biscotte se lève après nous. Elle doit se demander si elle a passé tout droit.
Direction, cette fois-ci: le chalet du Mont-Royal. Le but de l’expédition: assister au lever du soleil de la journée la plus longue de l’année, celle du solstice d’été. C’est une tradition instaurée il y a plus de vingt ans maintenant par les parents de notre ami Antoine Gélinas, blogueur bouffe émérite et, tout comme son amoureux Sylvain, lutin de la fondation des P’tits Lutins. Le travail et mille autres activités nous ont empêchés de participer à cette tradition les années précédentes. Mais cette année, aucune excuse n’est valable pour nous; d’abord, le solstice est un samedi et ensuite, on ne peut plus invoquer le travail…
Toujours la même fluidité dans la circulation inexistante. La même impression de silence et de calme dans la ville endormie.
Jusqu’à la sortie de la voiture dans le stationnement près de la Maison Smith sur la montagne: plusieurs jeunes gens encore en tenue de bal de finissants s’interpellent bruyamment et se dirigent, tout comme nous, sur le sentier qui mène au chalet du Mont-Royal. Curieux, tout de même; le complet trois pièces, les talons hauts et la (très) petite robe noire ne me semblent pas convenir tout à fait, ni au sentier, ni aux 13 degrés Celsius ambiants (c’est même amusant de penser que eux et nous allons au même endroit pour la même raison)… Pensée bien inutile qui révèle mon (notre) âge et des préoccupations sans doute trop terre à terre!
Nous serons donc quelques dizaines au sommet à attendre le soleil (version 2014 du Temple du soleil de Tintin, sans mise à mort ou d’éclipse évidemment). Certains plus discrets que d’autres. Plus ou moins zen. Plus ou moins jeunes. Plus ou moins à jeun! Plus ou moins gelés. Plus ou moins admiratifs de la scène naturelle.
Une bien jolie tradition! Au retour, après la photo de groupe (merci Antoine!), le groupe de parents et d’amis marcheront jusqu’à Outremont en piquant par le cimetière. Nous choisissons de revenir doucement chez nous, après un détour par la boutique de bagels de la rue St-Viateur. Mmmmm! Bonheur: l’odeur et le goût des bagels frais!
En prime, toute une journée devant nous… la plus longue! (au moment d’écrire ceci, 9h44, Marie est de retour au lit depuis 30 minutes) Et l’été vient d’arriver! Le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt!

Marie et Yvan
P.S. Cette semaine, nous n’avons pas que fait des activités très tôt le matin. Mercredi soir, nous étions au Centre Bell avec des milliers d’autres personnes, de tous âges et de toutes cultures, à chanter (pas moi) et à danser beaucoup (nous aussi) avec Stromae. Quel personnage fascinant! Chanteur, danseur, comédien, musicien, deux heures d’un spectacle étonnant où des paroles parfois légères, parfois graves décrivent des situations parfois dures, parfois drôles sur des rythmes tout à fait entraînants (pendant le 3/4 du spectacle nous étions debouts!!!). S’il revient à Montréal, précipitez vous pour acheter des billets… et ayez une bonne nuit de sommeil… la veille. D’ici là, voici une de ses chansons les plus connues: Papaoutai.

