Rituel de l’aube
(Déclencheur et inspiration de ce billet: le décès de Jacques Proulx… Cette semaine, Yvan vous propose de jouer avec le passé et le présent. Je lui laisse toute la place, puisque m’immiscer romprait le rythme et ce serait bien dommage…)
Dans mon souvenir, il est très tôt le matin, la maison est presque silencieuse, papa écoute Jacques Proulx à CKAC; je me prépare à aller servir ma première messe.
Plus de 45 ans plus tard, le vendredi, je me lève d’aussi tôt matin. Sans faire trop de bruit, je prépare mon sac de sport. Marie (rien à voir avec les messes de mon enfance) se lèvera bientôt pour la même raison. Jacques Proulx est décédé il y a quelques jours.
La marche vers l’église est rapide, il fait froid, il y a beaucoup de neige. Je suis accompagné par le crissement de mes bottes sur la neige durcie.
Les premiers instants dans l’auto encore endormie sont froids et humides. Nous sommes accompagnés par Marie-France Bazzo à la Première chaîne de Radio-Canada qui nous souhaite bonjour.
5h50, Je mets nerveusement officiellement mon aube pour la première fois, j’espère me souvenir du nœud au cordon qui serre ma taille (plutôt mince à l’époque).
5h50, Dans le vestiaire, j’enfile le cuissard et le maillot en vue de la session de spinning. Je croise mon image dans le miroir. Ma taille a définitivement épaissi.
Le prêtre, dans ses atours de célébrant, semble particulièrement enthousiaste à cette heure hâtive de la journée. Quelques dizaines de personnes, dispersées un peu partout dans l’église, semblent concentrées et pieuses. Je découvrirai dans les semaines suivantes les mêmes personnes, aux mêmes endroits, dans les mêmes dispositions.
Johanne, notre animatrice, manifeste toujours un doux enthousiasme pour cette heure de la journée. Nous sommes surpris de trouver quelques dizaines de personnes fort enthousiastes au moment d’entreprendre notre entraînement. Nous découvrirons dans les semaines suivantes les mêmes personnes, aux mêmes endroits, dans les mêmes dispositions.
La messe se déroule dans une chorégraphie sans anicroche, chacun, à par moi, connaissant son rôle et son texte.
La session de spinning se déroule sous les joyeuses mais fermes directives de Johanne. Les « rouleurs » démontrent un entrain surprenant auquel nous nous joignons progressivement.
À la fin de la cérémonie, dans un silence respectueux, chacun retourne à ses occupations du matin. Dans mon cas, je cours à la maison pour prendre un rapide déjeuner et partir pour l’école. Tiens, le soleil se pointe le bout du nez.
À la fin de la session, dans un brouhaha d’écoliers, nous allons prendre une douche avant d’aller déjeuner. Tiens, le soleil se montre le bout du nez…
Il y a quelque chose de profondément mystérieux dans le fait de se lever à l’aube pour aller s’entraîner… Difficile, en effet, de comprendre ou d’expliquer ses propres motivations à cette heure… de la nuit! Ça tient de la foi, sans doute… Ça ne s’explique pas, mais la satisfaction est immense, après, quand on quitte le centre; au moment où plusieurs autres mortels débutent à peine leur journée!
Yvan et Marie