Comme un vide dans l’estomac…
Pour cette semaine, je jonglais avec deux idées d’article. Comme il est arrivé quelques fois dans le passé, l’actualité devait influencer nos réflexions.
Je devais partir plus tôt cet après-midi-là pour une réunion spéciale à l’école des garçons. Dans l’auto, à la radio, la voix de Paul Houde n’a pas le côté enthousiaste normal. Au contraire, son ton très solennel ne convient pas à ce lundi ensoleillé. Avant même de connaître les détails de l’événement, j’ai cette mauvaise sensation, ce vide soudain dans l’estomac. Quelque chose de grave s’est passé…
D’aussi loin que je puisse me souvenir, le premier « arrêt du temps » que je garde en moi est l’assassinat de John F. Kennedy. Plusieurs semaines après l’événement, je me méfiais des fenêtres allumées dans le haut des maisons de peur qu’y soit caché un tireur. Je me souviens aussi de l’annonce du décès de Pierre Laporte ou, dans un autre contexte, de celui de René Lévesque. À chacune de ces fois, le temps « saute » d’une seconde ou deux, on doit respirer profondément et commencer rapidement à se refaire un monde sans ces personnes.
Mes souvenirs du même type remontent moins loin: John Lennon, les tours du World Trade Center. À chaque fois, l’incrédulité, le choc, l’incompréhension. À chaque fois le regard et le corps tendu vers les bribes d’information à la radio et à la télévision. Les mêmes images qui roulent en boucle, sans permettre de mieux comprendre. À chaque fois, comme lundi, comme un coup de poing. Un immense vide dans l’estomac.
Dans ce cas-ci, c’était la fête. Une des premières belles journées du printemps où l’on peut célébrer cette joie indescriptible d’être vivant et, pour plusieurs personnes, de réussir un défi physique pas banal. Pour trois personnes et leurs proches, ce jour qui avait si bien commencé s’est terminé tragiquement. Pour plusieurs autres, le futur sera à jamais modifié à cause de ce geste pour l’instant inexpliqué.
Aujourd’hui, on cherche encore une explication. On pense aux familles des gens touchés, aux parents des victimes et à ceux des suspects. Aujourd’hui, certains courront et leur course aura un autre sens.
Je me surprends à penser que j’aurais pu être à Boston à ce moment. Ça ne s’est pas passé dans un lieu reculé du monde lors d’une activité où je ne suis jamais impliqué. J’ai mal à mon humanité, mais fatalement je n’y peux rien. Je ne peux que continuer à vivre pleinement en souhaitant que tout ne s’arrêtera pas aussi bêtement.
Le sens de notre existence vient, entre autre, du fait qu’elle a une fin. Je me souhaite que la mienne ne soit pas aussi insensée.
Yvan et Marie