Des nouvelles du Pépère à vélo et de sa blonde/maîtresse – 7 avril 2013

En route vers l’école…

(histoire créée par la famille Lalande lors du congé de Pâques 2013, à Wells, Maine )

Résumé: Fred et Lilli se rendaient à l’école à vélo. En chemin, ils découvrent un iPad dans le parc par où ils passent . En voulant l’utiliser , ils se retrouvent « absorbés » par celui-ci.

Fred et Lili se regardent, étonnés… Ils se reconnaissent mais ils sont différents… En fait, ils sont les mêmes mais ils ont 30 ans de plus. Ils sont maintenant des adultes.

Ils regardent autour d’eux et remarquent qu’ils sont sur un grand voilier qui s’appelle La Licorne. Ils aperçoivent aussi un vieux barbu qui leur dit: « Bande de Sparadraps, d’Ectoplastes, que faites-vous ici avec vos vélos trop petits pour vous? Êtes-vous ici pour astiquer le pont ou pour faire du BMX? Parole d’Haddock, vous ne resterez pas à rien faire. La première option est de monter au haut du grand mat pour sortir les voiles. La deuxième, c’est de marcher sur le tremplin à bâbord et de sauter dans le vide pour retrouver votre âge… Mais où, bande de cornichons, je ne sais pas! La seule chose dont je suis sûr, c’est que vous retrouverez votre vieux monsieur… »

Ce vieux monsieur, le voisin de Fred et Lili, devant chez qui ils sont passés ce matin, les a bien vus s’en aller à l’école. Il est toujours dans sa fenêtre à cette heure de la journée. Monsieur Kolikov vit seul depuis que sa femme est morte l’an passé. Il aime bien regarder toute cette activité devant chez lui alors que les gens s’affairent à aller au travail ou à l’école. Il s’assoit dans son vieux fauteuil devant la fenêtre du salon. Il a fait son thé noir du matin, son pain grillé et souvent il mange un peu de poisson fumé; oui, oui, du poisson fumé! Dans son pays, c’est à tous les jours qu’il en mangeait.

Monsieur Kolikov est russe. Il est au Québec depuis les années ’60. Il a ouvert un restaurant l’année de l’exposition universelle de 1967. Il devait être à Montréal pour l’été seulement mais il a connu sa Juliette, celle qui est devenue sa femme. L’Amour de sa vie.

Andrei Kolikov et sa Juliette ont été amoureux jusqu’à la fin… Juliette a été très malade, le cancer. La maladie a été plus forte et l’a emportée. Mais Juliette était heureuse, elle a eu une belle vie avec Andrei, son russe au grand cœur Lui, Monsieur Kolikov, a eu le cœur brisé lorsque Juliette est partie mais on dirait que son amour existe encore. Tellement, qu’il lui parle le soir dans sa chambre. Elle l’apaise et le rend moins triste. Parfois même, il se réveille le matin avec le cœur léger, un sourire au coin des lèvres. Il pense alors qu’elle a passé la nuit avec lui.

Ce matin là, Monsieur Kolikov a vu Lili passer à toute vitesse comme d’habitude. Toujours pressée celle-là, comme si elle allait manquer quelque chose!

Son frère, Fred, la suivait, plus lent qu’elle, la tête en l’air à regarder les oiseaux et les nuages. Il lui a envoyé la main comme tous les matins du printemps où il fait beau et que Fred prend son vélo pour aller à l’école. Il est gentil Fred, chaque fois qu’il peut, il rend service. Il aime aussi quand Monsieur Kolikov lui raconte des histoires de son pays. Monsieur Kolikov aime bien Fred.

Aujourd’hui, c’est congé. Lili travaille à la recherche d’un médicament qui guérira le cancer; Fred, lui, oeuvre pour un journal artistique. Ils participent tous deux à un tournoi de scrabble même s’ils sont vêtus d’habits légèrement ringards.

En fait, tournoi de scrabble, recherche sur le cancer ou journal artistique, Lili et Fred n’y pensent plus tellement. Ils sont sur le pont de la Licorne, encore « sonnés » par les paroles colorées du vieux barbu. Comment peut-on, en un éclair, passer du parc à ce bateau et franchir une telle distance dans le temps?!?

Le vieux Haddock les regarde. Il semble se demander ce que ces deux « grands macaques » vont faire. Alors il leur dit: « ne restez pas plantés là, espèces de bachibouzouks à vélo! Venez à l’intérieur prendre « un p’tit remontant. »

Ils entrent alors tous les trois dans la cabine du Capitaine. Les murs sont tapissés de cadres et de photos. Fred et Lili reconnaissent sur les photos plusieurs personnages qu’ils ont vus dans de vieux albums de bandes dessinées de leur père, les albums de Tintin. Fred reconnaît Tintin, le journaliste qui voyage partout dans le monde. Lili reconnaît le professeur Tournesol, ce savant un peu distrait. Peut-être que ces personnages les ont inspirés pour choisir plus tard leur métier?!

Mais trêve de nostalgie, ces considérations de « nouveaux adultes » n’ont que peu d’importance à l’heure actuelle… Il leur faut prendre une décision rapidement. Lili saisit son frère par le bras et l’entraîne sur le pont pour réfléchir et discuter. Que doivent-ils faire? Monter en haut du grand mat pour sortir les voiles? Le temps est en train de changer en mer, les vagues sont de plus en plus grosses et le bateau tangue dangereusement… Fred commence lui aussi à changer de couleur! Lili le ramène à la réalité: l’autre option, c’est de marcher jusqu’au bout de l’espèce de tremplin et de sauter dans le vide… Lili est convaincue que c’est la meilleure solution. Elle veut retrouver son corps d’enfant et sa vie d’avant. Elle s’efforce de convaincre Fred… elle peut devenir très convaincante et s’acharner, quand elle s’y met! Fred, lui, a de plus en plus mal au cœur Le bateau monte et descend sur les vagues de plus en plus déchaînées. Difficile de réfléchir avec le mal de mer! Lili voyant son frère verdir, se dit qu’il faut agir: elle l’entraîne alors sur le plongeoir.

À ce moment-là, le capitaine sort de sa cabine et, voyant ses deux invités essayer tant bien que mal de se diriger vers le côté du bateau, s’élance à leur poursuite en vociférant des insultes. C’est alors que le bateau, roulant et tanguant dangereusement laisse passer par dessus bord une vague phénoménale qui entraîne à la fois Fred, Lili, leurs vélos et le capitaine, armé de sa bouteille.

Ils se retrouvent tous dans un creux de vague, accrochés au mat de misaine, trempés et dégoulinants…

Autour d’eux, des débris du voilier, épars… L’eau est calme, la tempête terminée… Tout au plus quelques vaguelettes clapotent. Fred a retrouvé sa couleur normale et son visage de petit garçon. Lili, elle, devrait être contente, mais elle vient de s’apercevoir que le capitaine Haddock a été emporté avec eux… et qu’il est de très méchante humeur!

Les enfants comprennent rapidement où ils sont: de l’eau, tout autour d’eux. Et sur le coté du mat, une flèche et un mot qui scintille:

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DÉVERROUILLER

 

Comme à chaque jour, Monsieur Kolikov fait sa promenade « de santé ». Depuis le départ de sa Juliette, sa vie est faite d’une routine rassurante mais sans surprise. Son chemin passe par le parc emprunté par Lili et Fred ce matin. Au pied d’un buisson, il remarque cet objet un peu bizarre que plusieurs personnes utilisent maintenant. Il allait poursuivre son chemin quand il réalise que ses deux petits voisins sont DANS l’écran, pointant avec beaucoup d’énergie la flèche à côté du mot DÉVERROUILLER.

Se trouvant un peu stupide, il prend le iPad de sa main gauche et du gros index de sa main droite, il pèse sur la flèche… Rien, n’arrive! Les deux jeunes sautillent frénétiquement faisant des signes semblant signifier de POUSSER la flèche de gauche à droite. Le gros doigt fait maladroitement le geste mimé et PFTTT! Monsieur Kolikov peut maintenant embrasser les enfants… Puisqu’il les a rejoints dans la page d’accueil du iPad.

Comme ils sont heureux de retrouver un visage connu, rassurant, Monsieur Kolikov! Lili en a les larmes aux yeux. Fred, lui, ne réussit pas à démontrer ses émotions. Il réagit de cette façon lorsque la joie est trop intense. Monsieur Kolikov ne comprend pas ce qui se passe. Il est sidéré. Comment peut-il se retrouver dans cettte « machine »? Il regarde autour de lui et voit une ombre au loin. Comme un fantôme qui s’approche… Il s’inquiète, veut protéger les enfants. Il leur dit d’un ton autoritaire de reculer derrière lui. Les enfants le reconnaissent; c’est le capitaine Haddock, bouteille à la main, blasphémant… Monsieur Kolikov n’en croit pas ses yeux ni ses oreilles… C’est bien lui, eh oui! Ce bon vieux Haddock!

Fred, Lili, Monsieur Kolikov et Haddock se retrouvent donc seuls sur cette île déserte avec à côté d’eux ce morceau de mat de misaine. Haddock, bien qu’ayant navigué toute sa vie, ne l’a jamais fait sur internet… Il n’est donc pas d’une grande utilité! Raison de plus pour maugréer: « Mille millions de mille sabords, y a-t-il quelque chose à boire dans cette bougre de tablette?! »

Monsieur Kolikov réfléchit; il est parti de sa Russie natale avec rien et s’est reconstruit une vie à Montréal… Il lui semble qu’il devrait pouvoir les sortir de là! Si seulement sa Juliette était là; elle saurait sûrement tout organiser pour les ramener à la maison…

Lili de son côté tente d’imaginer une solution à leur problème. Dans sa tête elle émet des hypothèses, formule des réponses vagues à ses questions… mais seule, elle n’arrive pas à grand chose. Pas étonnant, maintenant qu’on l’a vu, que plus tard dans sa vie elle fera partie d’une équipe de chercheurs qui, espérons-le, trouveront un remède à cette maladie qui a emporté Juliette.

Fred, quant à lui, est parti explorer la petite île. Il escalade des rochers, traverse des ruisseaux et remaque en passant la beauté des paysages. On voit bien ce qui l’amènera plus tard à voyager à la recherche de toutes les beautés du monde… journaliste artistique, quel rêve! Mais rien de son exploration d’aujord’hui ne l’amène à la solution pour revenir à la maison. Il se retrouve vite de retour à son point de départ; le tour de l’île est vite fait.

Les quatre aventuriers sont maintenant assis, un peu découragés, tellement fatigués de tant d’émotions qu’ils s’endorment tous… Haddock plus profondément, la bouteille aidant.

Monsieur Kolikov sourit dans son sommeil. Il a retrouvé sa Juliette en rêve, une fois de plus. Il lui raconte son aventure avec les jumeaux et le Capitaine Haddock dans le iPad et, comme avant, elle rit! Sa confiance le réconforte et il lui demande son avis, comme avant. Elle lui parle d’un ami qu’elle s’est fait récemment, qui pourrait sans doute les aider avec ce curieux iPad. Il s’appelle Steve… Mais Juliette a toujours eu de la difficulté avec la mémoire des noms… Elle a oublié son nom de famille… Steve … Steve… Steve qui donc? Juliette répète le prénom… et curieusement, son nouvel ami, qui prend plaisir à ce qu’on parle de lui, arrive en souriant et en répétant son nom de famille à Juliette pour la… centième fois, sans doute: « Jobs, mon nom est Steve Jobs, chère Juliette! Vous avez besoin de moi? » En peu de temps, il a compris le problème et propose une idée: il leur faut absolument profiter du rêve d’Andrei et du « nuage » dans lequel ils sont tous actuellement. Les procédures sont claires:

  • retourner à la page d’accueil du iPad, retrouver les autres;
  • sautiller jusqu’à l’icône « réglage »;
  • sautiller jusqu’à l’icône « iCloud »;
  • de là, activer la fonction « localiser mon iPad ».

Rendus là, ils pourront retrouver le iPad dans le parc et repasser dans leur vie d’avant.

Ouf! Monsieur Kolikov s’empresse de ramener sa troupe dans le « nuage ». Fred et Lili ont vite compris les consignes données par M. Jobs et sautillent rapidement d’une icône à l’autre.

Monsieur Kolikov aurait voulu rester dans le « nuage » avec Juliette mais il a compris le rôle important qu’il pourra jouer auprès de Fred et Lili dans leurs choix de vie. Ils se laissent sur un baiser soufflé (une morte et un vivant ne peuvent se toucher) dont il gardera la douce sensation jusqu’au jour où il retrouvera vraiment sa Juliette.

Ce soir-là, il y a un invité spécial à la table du souper de Fred et Lili. Leurs parents ont d’ailleurs bien de la difficulté à comprendre leur conversation parsemée de plusieurs rires complices ainsi que la présensence d’un iPad qui appartiendrait à Monsieur Kolikov.

Pendant ce temps, quelque part dans l’espace cybernétique, le capitaine Haddock, autour d’une bonne bouteille de whisky, rivalise de vantardise avec Steve Jobs sous l’oeil amusé de Juliette.

ÉPILOGUE

6 juillet 2013, le Pépère à vélo attend le signal du départ avec près de 2 000 cyclistes lors du cyclo-défi pour la recherche contre le cancer. Il surprend les échanges entre deux jeunes d’une dizaine d’années et un monsieur qui a l’air d’en avoir soixante. Il ne comprend pas cette langue qui ressemble à du russe. Sur leur casque, la photo d’un être cher, une très jolie dame aux yeux rieurs qui semble trouver cette conversation très drôle.

Ce jour là, la route vers l’école est devenu la route contre le cancer.

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Histoire conçue à Wells, Maine, entre le 28 mars et le 1er avril 2013 grâce à l’idée originale de Julie et aux idées et à l’écriture de Pierrette, Benoit, Johanne, Martine, Julie, Marie, Antoine et Yvan. Le texte a été écrit à relais, à la main d’abord, dans un joli cahier, puis transcrit sur une tablette, justement, et corrigé sur une autre! Un plaisir d’écriture, partagé en famille.

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About Yvan Deslauriers

Je suis le Pépère à vélo. Avec Marie, ma blonde/maîtresse, nous sommes impliqués cette année, en 2019, au soutien de la recherche sur le cancer par l’entremise de la Fondation Myélome Canada et du financement de la Maison des greffés Lina Cyr. Cette implication se concrétise par la participation dans l’événement vélo pour Yvan et par la rédaction de ce blogue pour Marie et Yvan.
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