Autour d’une chanson
L’idée de ce défi nous trotte dans la tête depuis le début: l’idée, c’est de prendre le texte d’une chanson et de le commenter, plus ou moins sérieusement. Inspirée par la venue imminente de la St-Valentin et le hasard de la chaine musicale de la SRC, Marie nous propose cette chanson de Plume Latraverse. Lien étonnant entre Plume et la St-Valentin… En effet! Dans notre réalité, nous ne nous sommes pas rencontrés sur une patinoire mais par le biais de l’écriture (grosse surprise, n’est-ce pas?). Si nous nous étions vraiment rencontrés sur une patinoire, on peut imaginer que celle-ci aurait pu être celle qui est à l’angle d’Iberville et Beaubien. De là, on voit le cinéma Beaubien où on aime passer du temps (mais pas assez à notre goût).
Copyright – Plume Latraverse – Select Distributions 2007
LES PATINEUSES
Avec son coat en minou bleu, son foulard rouge, son béret noir était comme un bouquet frileux au milieu de la patinoire
Je n’ai jamais vu Marie en coat en minou bleu et si nous nous étions rencontrés sur une patinoire, c’est moi qui aurait eu le béret, qui était rouge à l’époque.
J’ai 8 ans. J’ai reçu en cadeau un ensemble bleu pour aller patiner: chandail à col roulé en laine et collants assortis, motif pied de poule bleu poudre et bleu royal; le tout rehaussé d’une tunique sans manches avec jupette marine en velours matelassé. Wow! Avec mes patins blancs de fille, je me sentais magnifique… Jusqu’à ce que je me retrouve sur la patinoire… D’abord, c’est pas chaud, mais surtout, mon style n’a jamais été très gracieux! Le « suit » bleu ne réussissait pas à camoufler les « tentatives d’arrêts sur bande »…
Moi, j’patinais sur la bottine… était-ce elle qui m’éblouissait? était-ce le décor qui glissait? J’avais les jambes en gélatine… je n’en croyais pas mes rétines et j’en perdais tout mon français
Mes talents de patineurs se sont développés sur le tard par les nombreuses heures sur le canal Rideau. Aurais-je eu l’audace et la capacité d’approcher cette « déesse des glaces » dans mon patinage approximatif? Quant au français, aucune inquiétude…
Curieuse, l’image des jambes en gélatine… Sur des patins, moi, j’ai plutôt l’impression que mes jambes ont la rigidité des popsicles…
Le vent emporta son béret et déploya ses longs cheveux Elle dût marquer un temps d’arrêt et j’eus le temps de faire un vœu que son béret vole jusqu’à moi, que je puisse mieux voir sa frimousse que je me porte à sa rescousse, qu’on se regarde avec émoi en souhaitant que le vent me pousse, moi qui patine comme une oie
Dans ce cas-ci, j’aurais probablement essayé mon plus beau style, tout en douceur (de toute façon en patin, je ne vais jamais vite), pour chuter avec grâce et rire tout près d’elle. J’aurais souhaité que ce mélange de démonstration athlétique et d’autodérision ait su toucher son cœur. Mélange gagnant, sans aucun doute! L’autodérision de l’athlète plait à la jeune patineuse terrorisée qui hésite à lâcher la bande…
Le béret, soufflé dans les airs, semblait ne plus vouloir tomber Je patinais tout de travers en le voyant se dérober Était-ce le hasard qui voulut faire preuve de haute précision lorsque j’entrai en collision avec la belle chevelue exécutant pour l’occasion un acrobatique salut?
Avec sa grande habileté physique, elle aurait voulu me tendre la main mais aurait perdu l’équilibre pour tomber avec moi. Nos lèvres ne se seraient pas rencontrées mais nos fronts, oui (collision frontale). Habileté physique qui rivalise avec le sens du ridicule, bien connus de mes proches, qui doivent sourire ici…
Étendu parmi les étoiles, foudroyé à deux minutes près quand le vent releva le voile et fit retomber son béret
C’est beau, cette image du vent qui, arrêtant de venter, fait retomber le béret! J’imagine aussi le rire des enfants devant notre gaucherie et le bruit des voitures circulant dans les rues avoisinantes, un peu diffus dans mon faux souvenir. Est-ce le choc physique ou amoureux? Je ne vois et n’entends qu’elle et le temps est arrêté, mais cette douleur au front est bien tenace.
Me suis perdu dans ses yeux d’ange et pendant un instant heureux comme lorsque l’on tombe amoureux, ce moment de curieux mélange où tout est tellement doucereux que vraiment rien ne nous dérange
Ça fait plusieurs fois que je relis ces lignes pour en arriver à la conclusion heureuse que je ne veux en rien y ajouter quoi que ce soit. Ben moi non plus! Pourquoi d’ailleurs? Les débuts d’histoires d’amour, réelles on non, ont ce quelque chose de magique qu’on cherche toujours…
Toutes ces fées sur qui l’on tombe et dont le secret nous attire qui nous font l’effet d’une bombe et qu’on laisse pourtant repartir dans des circonstances nébuleuses, sans même de contact établi et qui glissent vers notre oubli parmi nos amours en veilleuse sur des patinoires remplies de toutes ces belles patineuses
À partir de maintenant, en allant au cinéma Beaubien, on jettera un regard à l’endroit où la patinoire trône l’hiver et on sera convaincu que notre premier « contact » l’un avec l’autre y a vraiment eu lieu. Et on aura le plaisir tranquille d’un amour qui ne glisse pas dans l’oubli, loin d’être en veilleuse.
Pour écouter la chanson… http://www.youtube.com/watch?v=Aj4hwOTPgtY
Bonne Saint-Valentin, chers amis!
Yvan et Marie
